mardi 7 décembre 2021

Ahmed Ben Osman, officier et peintre

 

                                   Ahmed Ben Osman  (1848 – 1920)

                                               Officier et peintre

 

                               (A la mémoire de mes oncles Taoufik, Rachid et Majid Ben Osman)


 

     -Ahmed Ben Osman (portrait photographique).

 

 

 

     -Ahmed Ben Osman en compagnie de sa petite fille.

 

Ahmed Ben Osman demeure un cas isolé et prémonitoire : il est parmi les  tout  premiers à avoir adopté la peinture à l’huile et de chevalet, à un moment où la société tunisienne pré coloniale ignorait totalement cette pratique (1).

Indûment négligé ou omis par les auteurs de monographies et études se rapportant à l’histoire de la peinture en Tunisie, il doit être considéré, à bon droit, comme un précurseur qui avait apporté un précieux concours à la naissance d’une nouvelle expression artistique.

Toutefois, il est toujours risqué d’essayer de reconstituer la biographie et plus encore la personnalité de cet homme, qui fut d’ailleurs tout à la fois artiste et soldat, quand on ne trouve que peu de documents sur lui. Je tente cependant de relier de  maigres sources aux œuvres peintes, au demeurant rares, que j’ai pu découvrir chez des membres de sa descendance. Seul le hasard des rencontres familiales et amicales qui existent entre nous ont déterminé la découverte de ce peintre et de ses œuvres (2).

 Quelques rares toiles, en dehors de celles appartenant à des membres de sa famille, ont été jusqu’à présent retrouvées. Parmi  la douzaine de tableaux que j’ai pu découvrir, trois seulement sont datés ou datables, le reste ne comportant pas de signature. A part les trois toiles appartenant au Musée de Kassar Saïd (3), quatre autres œuvres, de dimensions  réduites, en possession de quelques particuliers, sont attribuées d’une manière arbitraire à Ben Osman. La non-conformité de leur technique ou de leur style me laisse perplexe sur cette attribution. Une analyse minutieuse doit être menée pour l’authentification de ces œuvres.

 D’après Mejid Ben Osman (petit-fils de l’artiste) une réplique du tableau  d'Auguste Moynier, peint aux environs de 1876, « La Mort du Général Farhat » (événement qui a d’ailleurs eu un grand écho de son temps), aurait été exécutée bien plus tard, dans les premières années du XXème siècle, par Ben Osman. (4) L’œuvre originale de Moynier faisait partie de l’ensemble de toiles qui ornaient la Salle du Trône au Palais du Bardo. Elle aurait été reléguée, à la veille de l'Indépendance, dans les réserves du palais de Kasr Saïd. Quant à la copie exécutée par Ben Osman, elle fut placée à la veille de l’Indépendance à l’entrée de la salle plénière du Parlement. Elle aurait, semble-t-il, disparu durant les travaux de restauration survenus dans les années 60 (5).

 Des dessins exécutés sur le vif ou des études préparatoires que l’artiste aurait réalisées, il n’en reste, non plus, aucune trace. 

Cherchant à mieux connaître le peintre, sa vie de soldat m’a peu éclairé sur l’homme et le milieu dans lequel il a vécu. Un opuscule biographique, relatant les actions militaires du Général Osman, ne contient d’ailleurs sur son fils Ahmed que de maigres renseignements (6). On apprend que ce dernier, en sa qualité de Capitaine, de Commandant de l’infanterie, puis de Lieutenant-Colonel de l’armée beylicale, avait participé assidûment à côté de son frère aîné M'hamed aux campagnes dirigées par leur père, le Général Osman, notamment lors de l’Insurrection de Ben Ghedahem survenue en 1864 (7).

Trop de détails manquent aussi qui permettent de reconstituer la vie du peintre et la chronologie de ses œuvres. Devant le peu de références biographiques, on ignore jusqu’aux noms des maîtres et écoles que  l’artiste a fréquentés lors de son séjour en Italie et le moment précis de ce voyage. Il aurait vraisemblablement, au dire de certains de ses proches, suivi les cours de l’école de Venise et c’est là qu’il se familiarisa avec les peintres classiques et néo-classiques (8). Certains confirment même qu’il a laissé, après sa mort, quelques carnets contenant des esquisses au fusain et à la mine de plomb et notamment une réplique de cent dessins préparatoires de l’ « Enlèvement des Sabines » de David qu’il réalisa lui-même, mais qui ont aujourd’hui disparu. Toutefois,  il n’est pas exclu de penser que d’autres œuvres sont encore à  découvrir ou ont tout simplement disparu  au cours du temps.

 Son existence se déroula, le voyage d’Italie excepté, principalement entre Monastir, sa ville natale, et Tunis où il s’établit vers 1880 jusqu’à sa mort. Les   quelques témoignages glanés sur sa vie de famille demeurant en somme assez généraux, il est vrai qu’il existe une autre source : un examen plus attentif  des œuvres elles-mêmes, malgré leur rareté, pourrait nous livrer  quelques indications sur les préoccupations de l’artiste, de son milieu, de sa culture… Destiné principalement à sa carrière de soldat, ayant été marqué, dès sa jeunesse et à l’instar des siens, par un goût prononcé pour les choses militaires, il n’a point renoncé pour autant au plaisir que la manipulation de la palette pouvait lui procurer. Il semble pour autant avoir vécu une vie de solitaire pour qui la peinture n’était qu’un simple loisir de dilettante. Il  choisissait ses modèles le plus souvent parmi les  personnes de son entourage immédiat ou se contentait de recopier les portraits en photographie de certaines personnalités illustres de son temps. En somme, on voit le risque qu’il y aurait à vouloir faire trop dire à une documentation aussi mince.

Cependant, les toiles de Ben Osman qui paraissent de nos jours d’un naturalisme quasi photographique, étaient, au moment de leur réalisation, d’une nouveauté révolutionnaire. S'appuyant sur une technique importée et un langage totalement nouveau, cet artiste avant l’heure s’engagea dans une voie qui lui permit de déchiffrer un domaine jusque-là inconnu dans le milieu où il a vécu. En dépit de la rareté de sa production, il eut  le mérite de se classer parmi les pionniers qui ont inséré un nouveau système de représentation de la nature. Il faut être certes un personnage assez cultivé, ouvert sur le monde, curieux de ce qui se faisait ailleurs et qui savait parfaitement en tirer parti sans rien perdre de son originalité. Les influences subies par lui sont si diverses, si parfaitement assimilées et si profondes qu’il faut bien, malgré la discrétion des textes, lui accorder une personnalité puissante et imaginative, comme un homme accoutumé à réfléchir sur son art.

N’oublions pas qu’ayant reçu une formation militaire, il intégra l’Ecole polytechnique du Bardo. Cette institution, fondée en 1824 par Ahmed Bey, était ouverte à la civilisation occidentale et assurait un enseignement de disciplines scientifiques : arts et histoire militaire (artillerie, topographie, organisation des armées, architecture des fortifications) mais aussi le français, l’italien ainsi que la littérature arabe).

Ahmed Bey lui-même, dont la mère était une captive italienne, pratiquait assez couramment sa langue maternelle. Le Général Osman,  comme la plupart des mamelouks  éduqués au sérail, parlait aussi l’italien et l’avait appris à tous ses enfants. Ahmed, le fils du Général Osman,  se perfectionna également  dans cette langue au cours de son apprentissage à l’école militaire. Ce fait a probablement incité son père, conseillé d’ailleurs par le Consul d’Italie , à permettre à son fils d’entreprendre le voyage en Italie et de séjourner à Venise pour sa formation artistique.

L’époque dans laquelle vécut Ahmed Ben Osman fut dominée par un mouvement de modernisation de la Régence marqué par le règne d’Ahmed  Bey I (1837-1855). Celui-ci, en souverain éclairé, fut le premier à avoir adopté les signes de l’européanisme. Consolidant son pouvoir, il entretint un certain culte de sa personne en attachant de l’importance à se faire portraiturer (9).

Le portrait de cours allait ainsi constituer, à partir de cette époque, une  manière de confirmer la dignité beylicale, mais aussi à représenter les traits individuels du prince, portant des décorations et des insignes, sous une apparence  majestueuse.

L’étude du  milieu politique et culturel propre à la Tunisie du XIXème siècle nous éclaire sur les balbutiements d’une nouvelle expression artistique et d’une nouvelle  appréciation esthétique qui commencent à se manifester dans l’aura des princes régnants et de leurs principaux dignitaires puis à se propager peu à peu dans certains milieux restreints, participant à ce goût imitatif qui se développe au contact des étrangers installés dans le pays.

 La peinture qui se faisait à ce moment, composée surtout  de portraits et de rares scènes de genre, n’avait d’ailleurs, en dehors de sa  fonction dignitaire et ostentatoire, aucune portée sur l’ensemble du public. La société tunisienne, encore attachée à ses propres traditions, était gérée par des corporations soumises à la réglementation de l’artisanat. L’artiste au nouveau statut, se dégageant de toute contrainte corporative, devient ainsi un être à part, un être marginal. De plus, il brave une attitude très hostile de la part de certains milieux traditionalistes intransigeants qui condamnent toute forme de figuration et de représentation de la nature et qui rejettent tout ce qui est moderne et qui provient de l’Europe.

Formé à la discipline de la peinture académique, Ben Osman appliqua les règles esthétiques qu’il avait apprises dans un esprit d’imitation de ses maîtres portraitistes. Son œuvre reflète une connaissance assez précise des modes de représentation conventionnels.  L’éclairage artificiel et le procédé du modelé et du clair-obscur sont employés systématiquement comme éléments pittoresques et comme éléments constructifs. En modulant la lumière sur un fond sombre, ses figures sont ainsi mises en valeur.

L’art de Ben Osman demeure cependant plus préoccupé de noblesse que d’effet, de stabilité que de mouvement. Ses personnages paraissent parfois un peu guindés,  un peu tendus.  Plaqués sur un fond neutre, ils sont traités dans une écriture scolaire, marquée par l’enseignement des petits maîtres dont il était l’élève. Néanmoins, il faut admettre dans l’ensemble que ces œuvres, considérées sous leur aspect plastique, traitent d’un certain savoir-faire technique, d’une certaine méticulosité et notamment d’un certain sens de l’observation.  Elles revêtent un intérêt documentaire non négligeable. Les marques de distinction honorifique, les insignes et les uniformes dans les portraits officiels, observés avec minutie, caractérisent une peinture qui affecte l’exactitude photographique, visant ainsi à renforcer la crédibilité et la justesse de la représentation. Cette peinture léchée, en trompe-l’œil, qui fond ses touches en glacis sur une surface lisse, investit le modèle d’une présence absolue et captivante. En isolant les figures de ses personnages sur un fond neutre, Ben Osman leur donne une certaine insistance fascinante.

Grâce à la culture qu’il avait acquise, à son ouverture d’esprit et à sa faculté d’assimilation, il est inconcevable d’imaginer qu’il ait pu adopter la perspective et les modes de représentation académiques de façon intuitive ou empirique. Il serait faux de ne voir dans cet artiste qu’un curieux dilettante sans lui attribuer le fait qu’il sema les premiers germes d’une nouvelle vision du monde et sans   évoquer le fait qu’il fraya la voie à tous ceux qui allaient lui succéder. Manipulant assez habilement les techniques picturales qu’il avait assimilées, une incontestable poésie, franche et directe, le distingue sans peine.

Certes, un traitement analogue se rencontre un peu plus tard chez des artistes spécialisés dans l’art du portrait tel que Hédi Khayachi (1882-1948), dont la production est bien plus prolifique mais qui applique les mêmes procédés académiques (10). Parmi les peintres qui ont suivi la même voie  avec une certaine prédilection pour l’art du portrait, citons Mahmoud Ben Othman (1903-1987) (11) et Noureddine Khayachi  (fils de Hédi) (1918-1987) (12) qui sont restés dans le même sillage de  la tradition  académique.

En somme, peu productif et borné à peindre des portraits qui n’ont pas excédé les limites de la sphère familiale, le nom de Ben Osman ne figure pas dans la liste des exposants au Salon de Tunis qui avait ouvert ses portes aux artistes du pays depuis 1894. Une quinzaine d'années après sa mort, nous assistons aux premières tentatives de groupements d’artistes nationaux qui allaient prendre en main leur sort en commençant, vers la fin des années 30, à se manifester : le groupe des quatre (1936) et le groupe des dix (1948), scellés une année plus tard par l’ « Ecole des Tunis » qui instaura une nouvelle remise en question d’une peinture tunisienne revendiquant son authenticité à travers une nouvelle prise de conscience de sa personnalité et de sa différence.

Toutefois, si Yahia Turki (1901-1966) a bien mérité le surnom de « père de la peinture tunisienne », ne commençant pourtant à se manifester au Salon Tunisien qu’à partir de 1923, son œuvre, beaucoup plus prolifique et notoire, retraçant les scènes de la vie populaire, s’est ainsi largement diffusée (13).

Il demeure qu’Ahmed Ben Osman, malgré la rareté de ses productions,  a eu sans conteste l’avantage d’être le premier, parmi tous nos artistes pionniers, à avoir annoncé les signes avant-coureurs d’une pratique nouvelle. Il fut ainsi en mesure d’explorer une technique importée et un nouveau savoir-faire et  d’adopter un langage totalement nouveau.

Nous reconnaissons en lui l'avantage d’avoir devancé son siècle, en annonçant, à quelques décennies près, l’éveil d’une nouvelle prise de conscience esthétique qui fera ses preuves avec les générations de peintres nationaux, et qui voit s’accomplir une expérience picturale florissante susceptible de renouer avec les temps forts et originaux de l’histoire picturale en Tunisie.  

 

Notes : 

(1)   Il fut précédé par Mohamed Lamine ben Mustafa Bey (1825-1876) (frère cadet  d’Ahmed Bey 1er). Vers l’âge de 12 ans, il fut parmi les premiers inscrits à   l’Ecole Polytechnique du Bardo (voir P. Marty : Historique de la mission militaire française en Tunisie,  « Revue Tunisienne » (2-24) 1935, pp. 50-56). Il s’adonna en tant qu’amateur à l’art de la peinture. On connait de lui une huile sur toile (81x60 cm) représentant Md Sadok Bey accompagné de sa suite lors de sa rencontre à Alger avec l’empereur Napoléon III (septembre 1860) (collection privée). (Un autre tableau, traitant du même sujet,  exécuté par Alexandre Debelle (paysagiste et peintre d’histoire), est déposé à Kassar Saïd).

(2)   Que tous ceux et celles qui m’ont aidé à la réalisation de cette étude veuillent  bien trouver ici le témoignage de ma reconnaissance et de mes remerciements. (Parmi eux, je rends Hommage à ceux qui nous ont quittés pour un monde meilleur).                                        Je nomme en particulier S. E. Lassad Ben Osman, Mme Zeineb Ben Ahmed, Mme Férida Ben Cheikh, Mme Golsom Bahri Ben Osman, S.E. Hédi Mabrouk, M. Mongi Mabrouk et Mme Azza Agha, Mme Jalila Bahri, Mme Essia Baccouche pour l’affabilité de leur accueil. Je tiens, en particulier, à exprimer ma vive gratitude à Mme Babouna Ben Osman qui m’a encouragé à consacrer une étude (aussi brève soit-elle) sur son aïeul ainsi qu’à Mlle Sonia Ben Osman pour sa précieuse aide, je les  remercie pour leur extrême bienveillance.

(3) Le Musée Ksar Saïd, baptisé depuis 2019 Palais des Lettres et des Arts, abrite une collection  de mobiliers et une soixantaine de tableaux de peintures historiques datant de l'époque beylicale. 

(4) En 1864, date de la mort du Général Farhat, Ahmed Ben Osman n'avait alors que 16 ans. Si l'on croit à l'existence d'une copie du tableau de Moynier, celle-ci aurait été exécutée bien des années plus tard, vers la fin du XIXè siècle ? Cf. Khaled Lasram, "Un tableau de Yahia Turki, la mort du Générak Farhat", blogger.com, sept. 2012;

(5)   Le "Répertoire des Artistes tunisiens" consacre un bref aperçu sur Ahmed Ben Osman accompagné d'une illustration du fameux tableau représentant le portrait équestre du Général Khéreddine en tenue d'officier. Il semble que cette œuvre, peinte par Louis Simil en 1852 et déposée au Musée de Kassar Saïd, est ici faussement attribuée à Ben Osman, (à moins que celui-ci ait exécuté une réplique, ce qui nous parait peu probable). Cf. http ://repertoir-artistunisiens.com/ahmed-osmane/ .

(6)   « Le Lieutenant-Colonel Ahmed Ben Osman : Né à Monastir en 1848, où il fit ses études coraniques ; parlant très bien la langue italienne ; peintre de grand talon. Entré au service militaire tout jeune, il fut nommé capitaine en 1864 et commandant dans l’infanterie à Sousse, en 1866. Il prit part au combat d’El-Hamma de Beni-Zid, en  1866. Nommé lieutenant-colonel en 1877, promu commandeur du Nichen quelques années plus tard, il fut enfin nommé bach-mameluk de Son Altesse le Bey en 1906. Si Ahmed ben Osman est décédé le 24 janvier 1920 à Tunis. » Cité dans : Hassan Ben Osman : « L’Emir, le Général de division Osman, Gouverneur militaire et civil de tout le Sud de la Régence », Imprimerie Rapide, Sousse, 1923, p. 15. 

(7)   Le Férik ‘Oçmân (Osman), de son nom d’origine Yani Karalopoulos, mamelouk né vers  1810 à Héracleion (actuelle Grèce appelée à l’époque Candie), fut ravi aux siens par des aventuriers grecs. Ses parents, raconte-t-on, furent décapités devant lui et son frère. Celui-ci, vendu à la cour d’Egypte, devint un brillant personnage connu sous le nom de Dhoul-Fakhar Pacha. Yani, quant à lui, il fut conduit  à Tunis. (Ces faits que j’avais recueillis de mon oncle Magid B.O. ont été relatés par la princesse Nazli Fadhel qui avait personnellement connu Dhoul-Fakhar Pacha et qui avait elle-même constaté la ressemblance frappante avec son présumé frère Yani). Ce dernier fut conduit à Tunis et incorporé dans le corps des mamelouks sous le règne d’Hussein Bey II. Élevé dans la foi islamique, il a reçu pour nom Othman qui, selon l’usage turc se prononce Osman. Au service d’Ahmed I, de Mhamed et de Sadok Bey, il intégra l’Ecole polytechnique du Bardo, en tant qu’élève de la première promotion de 1846. Il fut chargé, en 1855, de rejoindre le corps expéditionnaire de Crimée pour seconder le Général Rachid. En 1864, il dirigea une colonne armée durant l’Insurrection menée par Ali Ben Ghédahem. Entre 1865 et 1879, il fut nommé férik : chef des garnisons militaires du Sud tunisien. Membre du conseil particulier du Bey, Membre du Grand Conseil et président du Conseil ordinaire. Il a édifié un grand palais à Monastir et un second plus petit à Skanès. Il décéda à Monastir en 1879. Son tombeau se trouve à la zaouia de Sidi ‘Abd es-Salem al- Ahmar. Cf. H. Ben Osman, op. cit. pp. 4-5 ; Mustapha Kraïm, « La Tunisie pré coloniale », vol. 1, pp. 447-450 ; Md. Salah Sayadi, « Monastir, essai d’histoire sociale du XIXème siècle, Tunis, 1979, pp. 475-479, 520.                      

Son Exellence M. Hédi Mabrouk, ancien Ambassadeur de Tunisie en France, m’avait remis un article qu’il fit paraître dans « La Presse » du 25 novembre 1982 (intitulé « Le Général Ben Osman »). Fidèle à sa mémoire, je présente ici en entier le texte de cet article : « Le Monde Dimanche du 24 octobre a consacré dans sa rubrique « courrier » sous le titre « Crétois » un commentaire signé de M.E. Edlinger à mon aïeul le général Osman. Un souci de vérité historique m’incite à compléter ce commentaire par les précisions suivantes qui, à mon avis, mériteraient publication. Le Général Osman, né en 1810, à Candie, dans l’Île de Crête, l’a quittée pour être accueilli en Tunisie où, s’étant converti à l’Islam, il a fait carrière auprès d’Ahmed et M’Hamed Bey. Et, depuis, il ne s’éloigna plus de son pays d’adoption que pour conduire, comme adjoint au commandant en chef, le corps expéditionnaire tunisien envoyé par la Tunisie pour participer à la guerre de Crimée. Sa carrière militaire et ses responsabilités comme gouverneur d’une région couvrant le centre du pays du Sahel jusqu’aux confins de la Tunisie furent marquées par une intense activité qui ne se ralentit qu’un court laps de temps en raison de son refus de réprimer avec dureté un soulèvement provoqué par la cruauté du régime fiscal. Le général Osman, qui pratiqua sans restriction la polygamie en épousant quatre femmes, dont la première, une circassienne de la cour beylicale, a eu une descendance d’une grande ampleur tant par le nombre que sur le plan de la participation à la vie nationale ". 

( On raconte une étrange histoire que je me permets ici de rapporter : "Lors des travaux d'aménagement du Palais édifié par le Général Osman à Monastir, on a découvert, dans l'épaisseur des murs, l'existence de nombreux squelettes humains en position debout et dont on ignore l'identité. On n'a jamais pu élucider ce mystère! )  

(8)  Le nom d’Ahmed Ben Osman est cité de passage dans quelques articles traitant de l’histoire de la peinture tunisienne, sans donner plus de détails sur la vie et l’œuvre de cet artiste. Voir à titre d’exemple : « La Presse », 3 aout 1962 ; Hatem Bourial : Dans la ville, des plasticiens, « La Pesse », 8 aout 1987 ; A. Louati, 1997, P. 21-23, 67 sq. ; Hechmi Ghachem, Une petite et pétillante histoire, « le Temps», 23 avril 2011. Ces articles mentionnent que Ben Osman, durant son voyage en Italie, a séjourné à Rome. Cependant, certains membres de sa famille précisent bien qu'il a visité de passage  certains musées de Rome mais qu'il s'était établi à Venise et fréquenté ses écoles. 

(9)   Parmi les artistes étrangers qui fréquentèrent la cour de Ahmed Bey I : Charles-   Philippe Larivière (1798-1876), Charles Gleyre (1846-1874),  Auguste Moynier (1820-1891), Louis Simil, Alexandre de Beles… leurs œuvres sont aujourd’hui déposées au Musée de Kassar Saïd dont une partie a été transférée au Palais présidentiel de Carthage.

        (10) Hédi khayachi (1882-1948), portraitiste officiel de princes beylicaux et de dignitaires.                      Peintre de genre et paysagiste. Elève d’Emile Pinchart, il fréquenta les académies libres                    de  Montparnasse et s’initia, à Rome, à l’art du portrait.

       (11) Cf. Tarak Zarrouk : Mohamed Ben Othman, un éminent artiste et homme de lettres nous                    quitte, "Le Temps",13 février 1987.

      (12) Cf. "Mustapha Chelbi : Noureddine Khayachi in "Le Grand Album des Beaux-Arts" T.1,                    Edition Tunisie France, 2006, pp. 246-253.

       (13) Dans son article intitulé "La notion de "tunisianité" dans le discours sur l'art en Tunisie",                  Alia Nakhli émet un autre avis; elle note ceci:  "Nous pensons que l'appartenance                              aristocratique de Ahmed Osman et Hédi Khayachi ainsi que leur statut de "peintre officiel                auprès des beys de Tunis et le fait qu'ils étaient éloignés de la réalité du peuple, (même si                  Khayachi a peint des scènes de la vie populaire) ont poussé Hatem El Mekki à leur                            préférer  au lendemain de l'Indépendance, Yahya Turki comme précurseur. Ce dernier                        n'ayant aucun lien avec le milieu de la cour, il était par conséquent plus apte à traduire  les                 préoccupations de la nation tunisienne, désormais affranchie du pouvoir colonial.                              ("Revue IBLA", n° 218, p. 166).                    

 

 

 

 Table des illustrations

 


 


   -"Son Altesse Mohamed Sadok Pacha Bey entouré de ses dignitaires devant les escaliers des lions au Palais du Bardo" (vers 1881). Musée de Kassar Saïd. Il existe une autre copie de cette toile accrochée parmi un ensemble de tapisseries Gobelins, à l’escalier d’honneur de Dar Baccouche à Bab Ménara (Tunis).

 


 

 

   -"Le Férik Osman (père de l’artiste)"; appartenant à Jenaïna Bahri (l’original se trouve chez Mahmoud Ben Osman). (Une grande toile : "Le retour de la guerre de Crimée", peinte par A. Moynier et déposée au Musée de l'Armée à Manouba, représente le Général Osman, plus jeune, en tête des cavaliers. (A droite du Bey, le Général Rachid, commandant le corps expéditionnaire tunisien en Crimée)).



 

    -"Ahmed Pacha Bey",  Musée de Kassar Saïd



 


-"Portrait équestre du Général de brigade Kheireddine Pacha supervisant un exercice de cavalerie aux environs de Manouba", Musée de Kassar Saïd (réplique du tableau original exécuté par Louis Simil).



 


   -"Mohamed-Hédi Bey, accompagné du Président Emile Loubet à Paris, juillet 1904". Musée de Kassar Saïd.

 

 

 


   -"Portrait en pied de Mohamed-Sadok Bey", vers 1870, Musée Kassar Saïd

 


 


   -"Autoportrait", appart. à Mongi Mabrouk.

 


 

 

   -"Béchir Ben Osman, fils aîné de l’artiste" (né entre 1880 et 1883-1948); (54x65); appart. à  Zeineb Ben Osman.

 


 


   -"Le Vice-roi Mohamed Ali d’Egypte (fin des années 1760-1849)" (35x23cm); appart. à Babouna Ben Osman. (On peut voir au Musée de Versailles un portrait de Md Ali d'Egypte peint par A. Couder).

 

 

 


   -"Hussein Dey d’Alger (1764-1838)"; (35x23,5), appart. à M’hamed Ben Osman.


 

 


   -"Hussein Bey II de Tunis (1824-1835)" (35x23,5); appart. à M’hamed Ben Osman.

 


 


   -"L’Emir Abdelkader (1808-1883)" (35x23,5); appart. à Férida Ben Cheikh.

 

 

 

 

   -"Le Sultan de Zanzibar" (35x23,5); (Zanzibar, Ancien sultanat arabe, instaura la République en 1964 et fusionna avec la Tanganyka pour former la Tanzanie);  appart. à Férida Ben Cheikh.

 

 

   Khaled Lasram 

-Etudie à l’Institut Technologique d’Art d’Architecture et d’Urbanisme de Tunis (1971-1975). 

-Il obtient une thèse en Histoire de l’art à la Sorbonne Paris I (1981).

 -Professeur de l’Enseignement supérieur à l’Institut des Beaux-Arts de Tunis, ses cours théoriques se rapportent à l’histoire des arts plastiques, du design et des styles architecturaux à travers différentes civilisations.

- Il consacre de nombreux articles à l’histoire des arts plastiques et des arts décoratifs en Tunisie.

- Artiste-peintre, il se manifeste dans plusieurs expositions personnelles et collectives.


                                                                                                                         Soukra, octobre 1993;

 

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