vendredi 27 octobre 2023

Khaled Lasram, artiste peintre : « La peinture est une aventure périlleuse…,"Le Temps" (Arts plastiques) 16 juin 2007                                                                                                                           l   

Au Diwan Dar Jeld, « Eclats de signes » a envahi l’espace. Chargés de signes et de symboles, les œuvres de Khaled  Lasram offrent une certaine particularité et une once d’étrangeté qui attirent ou poussent à s’interroger, mais ne laisse jamais indifférent. Loin des ruelles de la Médina, nous avons rencontré le peintre qui nous a parlé de son parcours, de son exposition et de ses projets d’avenir…

Le Temps : -Si vous deviez vous présenter par vous-même que diriez-vous ?

-Je suis peintre et plasticien avant toute chose. Les gens oublient souvent que je suis peintre car ils ne voient en moi que l’enseignant. J’ai appris à peindre avant de pouvoir lire un texte. Je me souviens qu’à l’âge de cinq ans,  mes parents m’ont offert mes premiers crayons et papiers. Puis, j’ai fait l’école des Beaux-Arts afin de parfaire ma passion. Je suis parti en France pour achever mes études en Histoire de l'Art et j’ai réintégré l’Ecole des Beaux –Arts en tant que professeur.

Mon cursus universitaire m’a permis de cumuler des connaissances qui me servent dans ma propre pratique picturale. En enseignant les différents mouvements qui se sont succédé, particulièrement en Europe : (Renaissance, Classicisme, Romantisme, Impressionnisme, Surréalisme, Abstraction…), j’adopte un double regard : définir d’abord les particularités de chaque mouvement; ensuite voir le traitement et la manière de construire un tableau et de l’agencer; ce qui me permet de mieux saisir l’œuvre en elle même et de mieux pénétrer l’univers de tel ou tel peintre. A mon sens, cette démarche proprement pédagogique m’a été enrichissante  et m’a permis, en tant que peintre, de quérir un certain savoir-faire et d’être à la fois plus appliqué et plus  méthodique.

-« Eclats de signes » est, je crois, la deuxième exposition personnelle que vous signez. A quoi est due cette carence au nouveau de l’exposition ?

-A vrai dire, « Eclats de signes » est ma troisième exposition personnelle…Si je ne suis pas prolifique en matière de peinture, l'enseignement exige en lui-même beaucoup de temps et d’énergie. Je suis aussi un fervent lecteur et je consacre quotidiennement quelques heures pour assouvir cette passion. 

Je me souviens que lors de ma première exposition qui s’est tenue à la Galerie Médina, j’ai constaté, après coup, une absence de thème central et que les œuvres accrochées étaient assez disparates. J’étais loin d’être satisfait et je cherchai encore ma voie. Ensuite une seconde exposition a suivi ; elle a été  acclamée par le public ; là aussi, j’ai été sévère avec moi-même et le résultat ne m’a pas convaincu. J’ai donc décidé de prendre du recul afin de trouver ma propre voie et mon propre style. Petit à petit je me suis retrouvé dans une peinture de signes, ni figurative ni abstraite. Mes références s’attachaient plutôt  à notre patrimoine local, maghrébin et méditerranéen…J’étais satisfait d’avoir enfin trouvé ma propre voix et l’idée de cette exposition m'est venue pour faire mieux connaitre au public mon travail. Cependant, ce ne fut pas aussi réussi comme je l’avais espéré et ce, pour plusieurs raisons. 

-Vous dites que votre exposition n’est pas réussie et ce pour plusieurs raisons ». Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

-D’abord, j’ai mal choisi le lieu. Je me rappelle que lors de la présentation et la signature du livre consacré à Abdelaziz Ben Rais, tout s’est bien passé, le succès était au rendez-vous et le livre a été bien accueilli. Durant cette exposition, j’ai voulu retrouver la même ambiance ; cependant aussi beau que cela puisse être, l’espace est inapproprié à contenir des toiles à cause du manque de luminosité et l’étroitesse des lieux par certains endroits. Il est vrai que le Diwan est un très bel espace mais il ne demeure pas moins qu’il soit inadapté pour l’organisation et la tenue d’une exposition.

Ensuite, plusieurs gens du métier n’ont pas été présents. Faute d’écho médiatique, l’exposition est passée presque inaperçue. Parmi ceux qui se sont déplacés, certains n’ont pas saisi l’essence même de mon travail. Ils n’ont pas réellement "accroché", me reprochant  un certains excès d'"intellectualisme". J’ai senti qu’il y avait un certain écart entre le public et mes propres œuvres…Je trouve qu’il s’agit là d’une aventure périlleuse qui exige de ma part une certaine réflexion et, de la part du public, l’acquisition d’une culture artistique et une mise au courant de l’actualité en matière d’art dedans et dehors nos frontières.  

-Depuis le titre de votre exposition « Eclats de signes » jusqu’à la composition des toiles elles-mêmes, nous sentons que le signe vous obsède… 

-En effet et cela explique ma propre démarche. "Graver, tracer, dessiner est à l’origine du signe". Si je dessine un arbre ou un animal, l’aboutissement final n’est pas d’obtenir une reproduction fidèle du modèle lui-même. Ce modèle va être peu à peu vidé de sa contenance qu’il ne reste plus que la finesse d'un trait. Même s’il perd son sens originel, ce "signe" possédera toujours une certaine dynamique et il représentera un élément vital. S’il perd de son apparence, il garde sa contenance de vie.

De plus, je trouve que le signe nous rattache à notre identité tunisienne depuis l’époque berbère jusqu’à l’époque contemporaine  en passant par l’héritage punique, romain et islamique dans lequel on retrouve un répertoire très intéressant de signes qui subsistent encore au fin fond de la Tunisie. Lorsque je les récupère et en les intégrant dans mon travail, je sens que je grave quelque part notre patrimoine dans l’avancée du temps.

-Khaled Lasram, l’après « Éclats de signes » ?

-En vérité, j’aurai ma retraite dans deux ans et j’ai plein de projets en tête. En ce qui concerne ma propre pratique picturale, je compte organiser une future exposition personnelle dans laquelle je réunirai une importante collection de toiles qui n’ont jamais été montrées au public. Je prendrai le temps qu’il faut en y ajoutant des travaux plus récents…

                                                                                                                                                                      (Propos recueillis par Raouf MEDELGI)


mercredi 25 octobre 2023

 

Rencontre avec l’artiste-peintre khaled Lasram

« De la réalité concrète à un monde de fiction »


Professeur à l’Ecole des Beaux-Arts de Tunis, Khaled Lasram est nouvellement retraité. Il consacre beaucoup de temps à peindre et à écrire. Nous avons recueilli quelques propos de lui lors d’une rencontre fortuite, le 15 mai 2015, dans une galerie d’art de la banlieue de Tunis.

-Votre première participation à une exposition de groupe remonte, dites-vous à 1975 ; depuis vous n’avez cessé de vous manifester en public quoique d’une manière sporadique. Quelles sont les raisons qui vous ont poussé, parallèlement à votre activité d’enseignant, à pratiquer continuellement la peinture ?

-Peindre est en soi un acte de délectation et de passion. Les artistes, les écrivains, les poètes n’ont pu créer leurs œuvres immortelles que sous l’emprise de la passion. « Je ne sus jamais écrire que par passion » avouait Rousseau ; et au père Couturier, Matisse déclarait en 1951 : « On dit que tout mon art vient de l’intelligence. Ce n’est pas vrai : tout ce que j’ai fait je l’ai fait par passion. » A l’instar des autres modes d’expression artistique (littérature, poésie, musique, architecture, arts du spectacle…), la peinture est en elle-même une source de bien-être et de réconfort. Elle rend la vie plus attrayante. Elle affecte notre culte de la beauté. Elle égaye nos intérieurs. Elle est aussi le plaisir du regard et surtout un moyen d’évasion qui nous fait échapper aux tensions et aux contraintes de l’existence, à la monotonie du quotidien. L’art est, selon la théorie freudienne, un défoulement, une libération de nos pulsions réprimées, une sublimation de nos instincts. Pour m’en tenir à votre question, j’emprunte à juste titre ces quelques mots à Robert Delaunay qui disait : « Je vis ; l’art est un moyen de se réjouir et de vivre et c’est tout ».

-Ce que vous venez de dire confirme que l’acte de peindre constitue pour vous une vraie raison d’être. Il est de notoriété que vos peintures sont appréciées aujourd’hui par beaucoup de gens qui trouvent dans la variété des thèmes que vous traitez un signe de richesse et de virtuosité. Mais il faut reconnaitre qu’à certains moments, il vous arrive de passer ex-abrupto de la figuration à l’abstraction. Cette attitude ne vous parait pas quelque peu déconcertante ?

- Je pense que ma peinture n’est,  à proprement parler, ni figurative ni abstraite. A part quelques exceptions, la majorité de mes œuvres se situent à mi-chemin. Si l’on tient à les définir, je dirais qu’elles sont semi-figuratives ou si vous préférez semi-abstraites. Elles se composent essentiellement de figures exécutées d’une manière schématique, à caractère allusif et analogique, évoquant des personnages, des arbres, des architectures et toute sorte de choses plus ou moins identifiables. Ces figures participent à l’édification de structures plastiques, dont la qualité absolue et la principale finalité consistent en une certaine stabilité formelle et une harmonie chromatique. Cela dit, je ne suis pas une exception ; beaucoup d’artistes font en même temps ou par moments de l’abstrait et du figuratif. L’exemple le plus proche de nous est celui de mon ancien professeur Hédi Turki (pour lequel je souhaite un prompt rétablissement). A côté de ses toiles abstraites, il a exécuté au fusain ou à la mine un grand nombre de portraits très expressifs dans une manière qu’il qualifiait lui-même de « réaliste ». La plupart des peintres modernes ont d’ailleurs connu, dans leur parcours artistiques, bien des revirements. C’est le cas notoire de Braque ou de Picasso. Après la période effervescente du cubisme, ils se remettent chacun à l’école des vieux maitres en reprenant des thèmes anciens. Cette remise en question perpétuelle, dans la carrière d’un artiste, est le fait même de l’évolution de son art marqué d’étapes successives, de changements continus, de soubresauts et d’hésitations. Cela est dans la nature même de son conformisme et de son aptitude à créer et à rénover. Je me contenterai de citer une fois de plus Robert Delaunay dont l’œuvre cumule à la fois les deux tendances « figuratives » et « abstraites ». Après une courte durée cubiste avec sa série de « Tour Eiffel » (1908), Delaunay évolue graduellement vers l’abstraction en entamant sa série de « fenêtres » (1912). Le motif de la fenêtre aboutit, dans ses « Disques et formes circulaires » ou dans ses « Rythmes sans fin », à une peinture pure dans laquelle toute référence à l’objet est bannie. Cependant, il revient fréquemment à ses anciens thèmes, notamment celui de la Tour Eiffel. Un retour à la figuration s’effectue enfin, durant les dernières années de sa vie, avec des natures mortes et de représentations de personnages.

Permettez-moi d’évoquer un peu l’histoire afin de vous démontrer qu’avec l’avènement de l’art moderne et la naissance des avant-gardes (début XXème siècle), les barrières qui séparaient jusqu’alors les différentes formes d’expression ont commencé à s’ébranler et différents genres et catégories ont été peu à peu abolis. Depuis, la dualité entre « figuration » et « abstraction » est devenue en elle-même une question subversive et de nos jours, elle perd tout son sens. Nous savons que l’art abstrait aussi bien que l’art figuratif ont de tout temps reposé sur des hypothèses esthétiques et des règles codifiées. « En art, note Cézanne, tout est théorie, développée et appliquée par contact de la nature ». Dans la tradition figurative qui dominait l’art occidental depuis la Renaissance, les artistes, même s’ils ont inventé des modes de représentation fondés sur l’illusion et le trompe-œil, étaient conscients de l’écart existant entre l’image peinte (ou décrite) et la réalité visible. Les courants et écoles successifs de peinture ont interprété différemment la nature et celle-ci n’a été en somme, pour les artistes qu’un prétexte et un point de départ.

Les peintres d’Avant –garde, à l’encontre de toutes les conventions académiques héritées du siècle précédent, n’avaient plus besoin de contrefaire la nature pour créer leurs propres structures picturales. La transgression a commencé avec eux. Rejetant les règles qui régissaient la perception de l’espace, ils représentent un monde où coexistent en même temps plusieurs perspectives. Les proportions se trouvent bouleversées, les dimensions et relations habituelles n’ont plus cours, les canons esthétiques du classicisme sont révolus, cédant la place au traitement des formes et à leur décomposition. Ces innovations, prônées par des mouvements tels que le Cubisme et ses dérivés (Rayonnisme, Section d’or, Orphisme, Purisme, Suprématisme, Constructivisme…), aussi bien que le Dadaïsme, le Futurisme ou même le Surréalisme, tous ces mouvements posent une nouvelle problématique, celle d’une quête d’expressions individuelles et frayent le chemin  à un art autonome qui ne signifie rien au-delà de lui-même et qui ne garde que peu ou prou de liens avec le monde des apparences. L’abstraction devient ainsi une forme d’expression essentielle de l’art du XXème siècle.

Même les courants stylistiques des années 60, créés en réaction aux tendances abstraites et à l’art informel (l’Hyperréalisme, le nouveau réalisme, la Nouvelle figuration ou le Pop art) s’éloignent de la réalité concrète en donnant à la peinture la neutralité de la photographie et en appliquant des techniques d’illusion et de dissection d’objets quotidiens.

-Passons à un autre sujet qui nous touche de près : en tant que théoricien et praticien, que pensez-vous actuellement du climat général des arts plastiques dans notre pays

- On assiste, en ce moment, dans quelques lieux d’exposition, à une multitude de rapins épris de nostalgie qui s’obstinent à perpétuer inlassablement les stéréotypes d’un folklorisme obsolète et qui, avouons-le, réalisent la plupart du temps une peinture clinquante et de mauvais gout. Pourtant, ceux-là mêmes reçoivent l’approbation d’un public majoritaire et par-dessus tout non averti. L’amateur tunisien, au gout restrictif, encourage cet art désuet, optant pour un réalisme anecdotique seul, à ses yeux, capable d’immortaliser les scènes mémorables et pittoresques de son beau pays.

A vrai dire, on ne peut aspirer à une culture de haut niveau qu’une fois que les nécessités vitales et les exigences élémentaires de notre société sont, en priorité, satisfaites. C’est alors que de nouveaux besoins d’ordre artistique et esthétique, certes moins impérieux mais plus nobles, vont se créer et permettre ainsi un accès plus facile de la part d’un large public à l’œuvre d’art. Ma conviction est que cette distance qui sépare jusque-là le public du domaine artistique pourrait être atténuée grâce à la réalisation d’un large programme de sensibilisation dont la responsabilité incombe, en premier lieu, au Service des Arts plastiques. Ce service, dépendant du Ministère de la Culture, devrait se mettre en coordination avec d’autres institutions étatiques (relevant en particulier du domaine de l’éducation, du tourisme et de l’information) afin de parvenir à mettre en application les mesures suivantes : -une initiation plastique de base au niveau de l’enseignement primaire et secondaire, -des débats et des conférences médiatisés sur des thèmes artistiques ainsi que des interviews menées régulièrement avec des plasticiens, -la publication et la diffusion d’une revue locale spécialisée dans le domaine des arts plastiques, -la création pressante d’un musée consacré à l‘art moderne et contemporain, médiateur indispensable antre art, artiste et public. (A ce propos, il est fort regrettable que, depuis la fermeture de l’ex Centre d’Art Vivant du Belvédère, en 1993, le projet de réalisation d’un nouveau musée n’ait pas encore abouti).

En considérant la réalité sous un angle plus optimiste, il existe en effet une poignée d’artistes ayant reçu le plus souvent une formation dans des écoles d’art et qui font preuve, pour leur part, de savoir-faire et d’inventivité. Jouissant d’une certaine liberté d’action, ils nous  livrent à travers leurs pratiques (menées pour certains d’entre eux dans un cadre universitaire et surtout appuyés par une réflexion théorique), des expériences fructueuses et d’une grande sensibilité. Il faut, hélas, que ces artistes (toutes tendances et tous styles confondus), une fois affrontant les espaces publiques, ne sont pas toujours estimés à leur juste valeur. Par les jugements d’appréciation et leur impartialité, les chroniqueurs et critiques d’art devraient s’assigner pour noble tâche le soutien moral et la reconnaissance de tous ceux parmi les plus qualifiés et les plus méritants de nos jeunes talents.

La peinture en tant que moyen d’expression, aujourd’hui en mal d’inspiration, prendra un nouvel essor, retrouvera un regain de vigueur et une véritable régénération en assimilant les signes et les symboles, la calligraphie et l’enluminure, les tatouages prophylactiques, les ornements, l’artisanat.., en intégrant toutes les traces artistiques d’une culture au riche passé. Ali Bellagha et Néjib Belkhodja ont été parmi les pionniers à saisir l’intérêt d’une telle démarche (le premier concernant les arts populaires, le second, l’architecture traditionnelle). Matisse lui-même ne s’est-il pas inspiré des tapis orientaux et des carreaux de céramique  qu’il a ramenés de son voyage au Maroc ? ). Ainsi s’accomplira une réconciliation entre art et mémoire : synthèse harmonieuse à laquelle aspirent, à travers leurs œuvres ingénieuses, une frange importante de nos jeunes plasticiens.

                                                                                                                                                                               Khouloud AMRAOUI

 

jeudi 29 juin 2023

Famille Lasram  (Histoire et personnalités)


(Ces quelques pages relatent l’histoire de la famille Lasram et présentent quelques-uns de ses membres).

« Ce ne sont ni les richesses, ni le nom d’illustres aïeux, Mais la vertu et les qualités du cœur qui distinguent les hommes »

                                                                                   0vide, Epist-Pont, 19. V39, 40.


La famille Lasram (al-Asram) puise ses origines dans les tribus yéménites qui ont participé à la conquête d’Ifrikya (1). Elle a élu domicile à Kairouan au moment de la fondation de la ville sainte par Okba ibn Nafaâ (VIIème siècle). L’une des portes de Kairouan, « Bâb Asram », du nom du fondateur de la famille, se situait dans le quartier ouest de l’ancienne cité (2). Elle a été démolie, ainsi que Bâb Salm, sis à peu de distance, lors des travaux de consolidation des remparts de la ville, entrepris par Mohamed Rachid Bey au début de son règne (1757) (3).

Durant les luttes successorales entre le Bey Husseïn ben Ali et son neveu Ali Pacha, les deux frères Ahmed et Mohamed Lasram comptaient parmi les partisans kairouanais les plus fervents ayant fait allégeance à la souveraineté husséinite et qui ont soutenu le Bey Husseïn lors de sa retraite dans leur ville (4).  

En 1740, le Bey Husseïn fut assassiné puis décapité. Ses deux fils, Mohamed et Ali, fuyant la répression sanglante menée par Ali Pacha, s'exilèrent en Algérie, en compagnie d’une poignée de fidèles, parmi lesquels Ahmed et Mohamed Lasram étaient des plus dévoués et des plus probes. A leur retour à leur patrie en vainqueurs, récupérant le trône de leur père (1756), Mohamed Rachid Bey et Ali Bey II récompensèrent les deux frères Ahmed et Mohamed pour leur assistance et leur loyalisme.

Depuis, les Lasram ont formé une véritable oligarchie de secrétaires de chancellerie (diwân al-inchâ) et de chefs de chancellerie (bâch kâtib), jusqu’au dernier d’entre eux, Mohamed IV, mort en 1861. A partir de ce moment, la famille perdit ses prérogatives dans la chancellerie beylicale. Certains de ses membres ont vécu de l'usufruit de leurs habous fonciers et  immobiliers ; quelques-uns ont exercé des fonctions administratives. On y compte également dans la famille quelques enseignants à la Zitouna (mudarris) et quelques notaires (udûl) (5).

Au début du XXe siècle, M’hamed Lasram (1866-1925) prit activement part à la vie politique et culturelle. Motivé par les revendications nationalistes, il fut l'un des principaux promoteurs du mouvement "Jeunes Tunisiens".

A une époque plus proche de nous, Abdelaziz Lasram a été membre du gouvernement sous Habib Bourguiba et occupa le poste de ministre de l’économie à différents moments de son mandat. En 1989, Mustapha Lasram a été élu membre associé de l’Académie d’agriculture de France. (6) Zoubeïr Lasram (président du festival de la Médina) et Khaled Lasram sont tous deux universitaires et théoriciens de l’art. Ils acquièrent aujourd’hui, ainsi que Zied Lasram, un certain renom en tant qu’artistes plasticiens. Saïfallah Lasram a été désigné maire de la ville de Tunis après la révolution tunisienne de 2011.


Personnalités

Ahmed Lasram (ben Mohamed al-Habib ben haj Ali ben Omar) (v.1710-v.1780); Bâch Kâtib (Premier secrétaire de chancellerie, responsable de l'administration fiscale), jurisconsulte, homme de lettres et poète (7). Très proche de Mohamed Rachid Bey, prince mécène passionné de musique et de poésie, il a notamment poursuivi l’œuvre musicale entreprise par son maître en complétant une partie des muwachahât andalous (malûf) et des suites mélodiques (nawbât) rassemblés par celui-ci (8). Il accompagna le prince héritier Ali Bey au Djerid, au moment du prélèvement des impôts, et à Kairouan durant les travaux de fortification des remparts. (9)


Mohamed Lasram Ier (ben Mohamed al-Habib ben haj Ali ben Omar) (1720 - 14 mai 1806) ; Caïd (gouverneur) de Sfax, khouja des askar zwâwa (commandant du corps des régiments de cavalerie berbère). (10) 


Mohamed al-Habib Lasram (ben Ahmed) né en Algérie de mère algéroise, dès le retour de son père à Tunis, il est inscrit à La Zitouna et reçoit une bonne formation. Homme de lettres et fin versificateur, il fut désigné kâtib  (secrétaire de chancellerie), (d.1818). (11)


Mohamed Lasram II (ben Ahmed). Né en Algérie, de mère algéroise. Il reçoit une première formation par les soins de son père avant d’être élève à La Zitouna.  Kahia du Bâch Kâtib (sous-chef secrétaire). Atteint de la goutte articulaire, il s‘installa, pour un traitement curatif, au village de Korbous où il édifia une maison, un établissement thermal et une mosquée dans laquelle il fut enterré au mois de joumada 1241 (janvier 1826). 

(Au début des années 1980, une bande de malfaiteurs, imbus de fanatisme, ont dégradé sa tombe, mais grâce à la prompte intervention des autorités, les dégâts ont été réparés) (12). 


Mohamed Lasram III (ben Mohamed Ier) (22 Rabi’ 2, 1243- lundi 12    novembre 1827). Bâch Kâtib. Responsable des registres fiscaux, (épousa Aïcha, fille de son oncle Ahmed ben Mohamed al-Habib).


Hammouda (dit Amira) Lasram (ben Mohamed Ier) (d. 9 février 1835). (Il épousa Hannouna Zitoun, et l'une de ses filles épousa son cousin Ali Zitoun). A la mort de son père, il devint à son tour khouja des askar Zwâwa (12) ; régisseur des recettes douanières ; conseiller intime de Hammouda Pacha. Il commanda un corps d’armée durant la guerre algéro-tunisienne de 1807. Amassant une fortune importante, il édifia un somptueux palais, rue du Tribunal, dont la construction dura plusieurs année (1812-1819), faisant appel à des artisans qualifiés qui réhabilitèrent l'art du naqch-hadida, qu'ils s'étaient eux-mêmes transmis de maîtres artisans marocains). (13)


  

  patio Dar Lasram, rue du Tribunal 


    


Salle d'apparat


Mahmoud Lasram (ben Mohamed Ier) (d- juillet 1837). Elève à La Zitouna, il a eu notamment pour maitre Hassen ah-Charif. Nommé par Hussein Bey II katib, il est promu  Bâch Kâtib à la mort de son frère ainé (Md Lasram III). 

(Domicile mitoyen à Dar Husseïn (Institut National du Patrimoine, Place du Château). Construit en 1759 par haj Younès ben Younès, riche armurier et familier de Youssef Sâhib-Taba', ce palais a été acquis et embelli par le Bâch Kâtib Mahmoud. Vers 1870, ses héritiers l’ont vendu, à l'exception de l'étage des hôtes, au Cheikh Mohamed Mohsen al-Kabîr, Imâm à la Zitouna, qui avait entrepris l'édification d'un étage supplémentaire. (14)


Mohamed Lasram (ben Hammouda) (d-1257 de l’égire, (1842), Kâhia (adjoint) des askar Zwâwa ; responsable des biens habous destinés aux lieux saints (awqâf al-haramayn). (15) Bibliophile, il consacra ses heures libres à transcrire, de sa belle écriture, des manuscrits rares pour garnir sa bibliothèque.



Manuscrit intitulé "Naktou al-himyân fî nikati an-'imyân" ((biographies des non-voyants célèbres) ; auteur : Salah-addine Khalîl al-Safadî (14è s.). A la dernière page est mentionné le nom du copiste : "Mohamed ben Hammouda ben Mohamed ben Mohamed al-Habib ben haj Ali ben Omar Lasram al-ansârî al-mâlikî". Copie achevée le 14 chawâl 1257 / 29 novembre 1841 (Cet ouvrage a été imprimé pour la première fois  en 1911, en Egypte, comportant une introduction en langue française.


Ahmed Lasram (ben Mohamed ben Ahmed) (d. 1275 de l’hégire (1858)). Wakîl (intendant) de la Râbita (chargé de l'exploitation en régie des silos et de la perception de la dîme des céréales).


Mohamed Lasram IV (fils de Mohamed III et d’Aïcha Lasram) (d. le vendredi 20 chawal 1277 de l’égire (3 mai 1861)). Elève à La Zitouna, il assista aux  cours du Cheikh Hassen al-Charif et en particulier du Cheikh Ibrahim al-Riyahi qui exerça sur lui une certaine emprise et auquel il voua une indéfectible amitié. Nommé par Hussein Bey kateb et Kahia de son oncle Mahmoud, à la mort de celui-ci en 1937, il accède au titre de  Bâch Kâtib.

A la tête d’une coalition de la cour contre certains agissements menés par le Premier Ministre Mustapha Khaznadar, Mohamed Lasram n’avait point obtenu gain de cause auprès des trois Beys successifs Ahmad, M’hamed et Sadiq. Pourtant, ces derniers étaient au courant des abus et des forfaitures de leur ministre, qui continuait à jouir d’une autorité incontestée, entouré d’une clique de gens corrompus qui le soutenaient dans ses manœuvres frauduleuses. (16) Dans cette ambiance de rivalités et de discordes qui régnait dans la cour beylicale, Mohamed Lasram dut se retirer mettant fin à son activité en renonçant délibérément à sa charge de premier secrétaire. Ce poste est resté vacant jusqu'à sa mort (17).

Ahmed Ibn abî-Dhiaf, Kâtib as-Sir (secrétaire particulier) de cinq Beys successifs, de par son âge et ses compétences, était le mieux qualifié à recevoir le titre honorifique de Bâch Kâtib, auquel il avait d'ailleurs aspiré depuis longtemps. Mais il se sentit profondément offensé lorsque l'influent Ministre Mustapha Khaznadar, réprouvant ses penchants réformistes, parvint à l'écarter, désignant à sa place une personne appréciable pour ses qualités de loyalisme et d'intégrité, Mohamed al-Aziz Bou-Attour, pourtant plus jeune qu'Ibn abî-Dhiaf d'une bonne vingtaine d'années. Ce dernier avait d'ailleurs été recruté, en 1845, en tant que secrétaire au Dîwân al-inchâ, sur la proposition même du Bâch Kâtib Lasram, lui permettant ainsi de poursuivre la même carrière que certains membres de sa famille, anciennement dignitaires dans la Chancellerie (18). Mohamed al-Aziz Bou Attour devint par la suite Ministre de la plume (1864) et fut promu, en 1882, Grand Vizir jusqu'à sa mort en 1907 (19).

Mohamed Lasram résidait au quartier de la Hafsia ; sa demeure après sa mort a été démolie et son terrain fut morcelé,  dont une partie a été affectée au Collège Khéreddine. Il avait aussi édifié, en 1831, une maison de plaisance à Sidi bou Saïd, composée de deux étages et d'un verger et munie d’une tour dans laquelle il passait le clair de son temps, loin du tumulte  incessant des estivants, s’adonnant  à ses deux occupations favorites : la poésie et la musique. (20)

Dans sa thèse, M.A. Ben Achour a rapporté, d'après un acte notarié daté de 1281 de l'hégire (1864), la liste des propriétés foncières et des biens immobiliers répartis sur plusieurs régions du pays qu'avait laissés, à sa mort, Mohamed IV (1861) (21). Ce patrimoine colossal fut d'une manière inconsidérée et inconséquente dilapidé par le fils du Bâch Kâtib, Hamda Lasram. "Les énormes sommes d'argent, l'or et les bijoux qui lui passaient par les mains, raconte-t-on, filaient aussitôt". (22)

En dehors de sa passion pour le chant et la musique, Mohamed IV fut surtout un fervent amateur de livres précieux. Sa collection se composait d'exemplaires rares ou uniques, de manuscrits anciens ornés d'enluminures, de centaines d'ouvrages qu'il avait, de son vivant, légués à son petit-fils Ahmed ben Hamda. A la mort de celui-ci, une partie de cette collection fut acquise par la Bibliothèque publique de Tunis (BNT).

(Afin de mieux fournir la bibliothèque de la Khaldounia, M’hammed Lasram,  frère de Ahmad et fils de Hamda Lasram (voir sa biographie ci-dessous) avait, de sa part, fait don d'un certain nombre d’ouvrages et des recueils contenant un ensemble de poèmes composés par le dernier Bach Kateb Mohamed Lasram).

Le célèbre "Dalâil al-Khayrât" (Le guide des bienfaits) de l'Imâm al-Jazûlî, provenant d’Istanbul et daté de 1810).

(Au recto du premier feuillet : une donation par acte notarié attestant que le Cheïkh Bâch Kâtib se dépouille du présent ouvrage, "Dalâil al-Khayrât", en faveur de son petit-fils Ahmed ben Hamda Lasram, qui accepte ce don et l'acquiert (approuvé par deux notaires ; 15 rajab 1242 / 12 février 1827).

                                                              Frontispice et page suivante 

A droite : Sanctuaire de la Ka'ba ; à gauche : Mosquée de Médine

A la fin de la dernière page, sont inscrits le nom du calligraphe (Mustapha  Bayazid..) et la date d'achèvement de la copie (rabi' II, 1225 / mai 1810)


Mohamed Lasram (ben Ahmed ben Mohamed III) (1820-1912), (sa mère appartenait à une famille d'origine levantine : les Qaraborni. Il épousa Jénayna, fille de son oncle Mohamed IV et sœur cadette de Fatma, (mariée au Cheikh al-Islam Ahmed Belkhodja II, dit Hmida, mort en 1895). Jenayna est décédée assez jeune, vers 1883, durant un séjour en villégiature à Radès et enterrée au cimetière de cette ville, laissant trois enfants en bas âge. Devant cette situation accablante, Hsouna  al-Haddad, cousin maternel de Mohamed Lasram, auquel il était d’ailleurs très attaché, sentant sa mort proche, dépourvu de descendance male, ayant perdu son fils unique Ahmed puis son petit-fils Saïd, sollicita ce cher cousin, lui-même veuf et en état de viduité, d’épouser après sa mort en secondes noces sa propre femme, en lui confiant en même temps ses deux filles, Fatma et Kalthoum. Cette  sage décision eut surtout l’avantage de préserver un héritage aussi alléchant et de le remettre  dans des mains propres et dignes de confiance.

Cette nouvelle épouse se révéla une véritable femme de qualité, toute dévouée aussi bien à l’éducation de ses propres filles que des enfants de son second mari. Elle était par ailleurs la fille de  Mohamed al-Qobbi, katib bank (scribe) du Bey Hussein, issu d’une famille d’origine andalouse actuellement disparue. 

Dès leur puberté, les deux sœurs, Fatma et Kalthoum,  furent demandées en mariage par plusieurs prétendants alléchés surtout par leur immense fortune. Cependant, devant le refus catégorique de Mohamed Lasram de consentir à leur demande, celui-ci maria les deux sœurs tant convoitées  à ses propres fils M’hammad et Belhassen, répétant à tous ceux qui répugnaient sa décision « Qui cédera son bien à autrui ? ».

Elève à la Zitouna, Mohamed Lasram obtint  le diplôme du tatwî (licence) qui lui permit d’exercer la charge de notaire. A cette époque, le notariat était considéré comme  une fonction estimable qui exige la confiance et la rectitude de  celui qui l’exerce. 

Il avait plus d’une soixantaine d’année lorsqu’il a été sollicité par les habitants de la vieille médina à intercéder en leur faveur en se joignant à la manifestation bourgeoise de Tunis qui se déclencha le 6 mai 1885. Quelques trois cent notables, parmi lesquels des imams et des  enseignants zeitouniens, des juges et des notaires, des amines et des artisans des  souks ont été présents au grand meeting qui s’est déroulé au Mausolée de Sidi Mehrez, en contestation contre les nouvelles  réglementations établies par le régime du Protectorat : la réforme du code municipal et des lois  financières, le recouvrement des taxes arriérées, les postes de travail occupés massivement par des étrangers aux dépens des autochtones, le remplacement de la langue arabe par le français dans le secteur administratif et notamment, les nouvelles procédures concernant les cimetières musulmans et la constatation des décès. De telles décisions mettaient en cause les intérêts  des tunisiens et dérogeaient à leurs principes et à leurs traditions. 

Les détails de cette affaire sont relatés par Cheikh Mohamed ben Othman Senoussi, principal dirigeant du mouvement, à travers son ouvrage  « Khoulasat an-nazila at-tounisya » (Précis sur la question tunisienne). (23) Les événements,  prenant de l’ampleur, un cortège de deux à trois milles personnes, présidé par Md Senoussi et le Cheikh zeitounien Mohamed Boukhris se sont rassemblées à La Marsa et  donnèrent mandat à plus d’une vingtaine de  délégués en vue de contacter le grand Ministre Aziz Bou Attour afin de présenter leurs doléances à Ali Bey.

On raconte que, s’adressant à son tour au Bey, en tant que porte-parole des habitants de la vieille Médina, Mohamed Lasram  monta sur un fauteuil, sans prendre la peine d’enlever ses bottines, manifestant ainsi, par cette attitude effrontée et désinvolte, son mécontentement ! (24). 

Cependant, le régime de protection a pu réprimander ce mouvement et persécuter ses dirigeants. Concernant Md Lasram, durant les jours qui suivirent ces évènements, une horde de carabiniers à cheval n’ont pas cessé de semer le trouble autour du quartier dans lequel il résidait.  

 Il fut aussi parmi ceux qui se sont vu retirer en représailles leurs brevets de notaires. Refusant de faire appel à l'indulgence du Résident Général, comme certains n'ont point tardé  à le faire afin de réintégrer leur fonction, son brevet ne lui a été rendu que trois années plus tard, en 1888.

A une époque où le culte des zaouia était très influent, Md Lasram, fervent adepte de la tariqua (confrérie) d’Abou al-Haçen al-Chadhouly, ne manquait presque jamais, durant chaque veillée du vendredi, de se rendre à cheval, suivi par un séide trottant derrière lui sur sa mule, au Mausolée situé sur la colline du Djellaz afin de  participer au cérémonial de la psalmodie des ahzàb (invocations). Faisant preuve de grande générosité envers les pauvres et les  démunis, il entretenait avec autant de piété et de dévotion les enseignements du saint. Ce cérémonial se terminait le lendemain matin. 

(Domicile : rue Bir Lahjar, n°4, Place Romdhane Bey) (25).


 Mohamed Lasram, vers 1885

Mohamed ben Ahmed ben Mohamed Bach kateb III, (peint par Hédi Khayachi)    

Motion de notables tunisiens contre le Protectorat, 6 avril 1884 (parmi les 57 personnes signataires, on retient le nom de  "Mohamed Lasram, makhzen", (tiré de "Khoulasat an-Nazila at-tounisiya", p.343. Parmi les signataires de ces requêtes, on retient les noms de Omar Lasram, dit amira ben Mahmoud ben Hamouda (khoujet zwawa)  son frère Hamouda ben Mahmoud ben Amira.   

  




Pages tirées d’un manuscrit (en calligraphie maghrébine) (14 X 14 cm) ayant appartenu à Mohamed Lasram. Dalail alkhayrat (le guide des bienfaits) (receuil de prières), auteur Imam Al-Jazouli. 


Ahmed ben Hamda ben Mohamed (domicilié à la rue du Pacha) ; cousin germain et beau-frère de Mohamed ben Ahmed (cité ci-dessous). Liés par une  indéfectible amitié, ces deux cousins étaient inséparables ; ils s’accompagnaient partout où ils allaient, à telle enseigne qu’on les surnommait « al-farqadàne » (« étoile polaire » et « étoile du Berger »).

Ahmed hérita d’une fortune considérable que son grand-père, Mohamed Bach Kateb, lui avait léguée de son vivant (et dont une grande partie fut dilapidée par son fils Mohamed (dit « le pianiste ») ; (voir sa biographie ci-dessous).

Amed ben Hamda Lasram


M’hamed Lasram (ben Mahmoud, Bach Kateb) secrétaire à la chancellerie ; Membre du Conseil des vérifications des comptes au Grand Ministère ; responsable des biens habous destinés aux Lieux saints.

Décret de nomination de M’d Lasram au Conseil des vérifications des comptes au Grand Ministère, signé Mustapha Khaznadar, Grand Vizir, en date du 15 dhul-hijja 1277 / 24 juin 1861.

Décret de Md Sadok Bey décernant le Nichen al-Iftikhar de 3è catégorie au Kateb Cheikh Md Lasram.  

Décret de Md Sadok Bey nommant le Cheikh Md Lasram responsable des biens habous destinés aux Lieux Saints ; cha’bâne 1287 / décembre  1870


Mohamed al-Habib Lasram ben Mahmoud ben Hamouda (Amira).  (né en 1280 de l’hégire /1863-64) Secrétaire au Ministère des Finances.


M’hamed Lasram (ben Hamda ben Mohamed IV) (1866-1925) (marié à une française décédée vers le début des années 60 et enterrée au cimetière de Borgel. Le 2 novembre de chaque année, célébrant la Toussaint, elle se rendait au cimetière du Jellaz et fleurissait la tombe de son défunt mari en y déposant un bouquet de chrysanthèmes).

Élève à la Grande Mosquée et au Collège Sadiki, M'd Lasram séjourna durant deux années en France où il termina ses études secondaires. Il travailla d’abord comme instituteur au Collège Alaoui. Se liant d’amitié avec Paul Bourde, ancien patron des forêts d’olivier, il lui succéda dans cette charge. (26) Il fut surtout l’un des fondateurs de la Khaldounia (arrêté du 21 décembre 1896) dont il fut le doyen (1900-1909). (Cette association a été conçue en tant qu’annexe à la Zitouna, dotant  l'étudiant d’une meilleure initiation au progrès scientifique moderne et à l'étude des langues) (27). Défenseur actif des droits des jeunes en Tunisie, il plaida en faveur de leur inclusion politique et sociale dans le pays. Il a notamment organisé, au sein de la Khaldounia, des ateliers, des conférences et des débats sur divers sujets d’actualité tels que la démocratie, les droits de l’homme, la gouvernance et la participation citoyenne. Il fut parmi l'élite évolutionniste et réformatrice des "Jeunes Tunisiens" qui  ont rédigé des articles dans divers journaux, notamment dans "Le Tunisien" (premier hebdomadaire en langue française, avec le sous-titre : "Organe Hebdomadaire d'intérêts indigènes", dirigé par Ali Bach Hamba) (1907-1912). (Quelques Français participèrent à ce journal, dont Klein Koberty (originaire d'Alsace et ami de Lasram) en sa qualité de  secrétaire de rédaction (éditeur)).

M'hamed Lasram traduisit, en collaboration avec Victor Serres, contrôleur   civil attaché à la Résidence générale de France à Tunis (1896-1900), deux importants ouvrages d'auteurs tunisiens (28). Il participa notamment au Congrès des Colonies à Marseille (5-9 septembre 1906) en tant que rapporteur, prônant la participation des "indigènes" (29) à l'administration de la vie publique et leur droit à l'enseignement. (30) Il participa aussi au Congrès consacré aux colonies de l'Afrique du Nord (octobre 1908), en envoyant un rapport sur l'état de l'enseignement supérieur en Tunisie (la mosquée de l'Olivier et la Khaldounia). (31) (D'amples informations concernant ce rapport, lui ont été fournies par son ami Cheikh Md Tahar Ben Achour, professeur à la Grande Mosquée). (32)

M'hamed Lasram fit partie, avec d'Ernest Dollin du Fresmel, de la commission présidée par le sociologue durkeimien Paul Lapie. Il participa à la commission chargée d'étudier la possibilité d'organiser l'exposition artistique, industrielle et ethnographique au Salon Tunisien.

C'est surtout dans le domaine de l'enseignement que M'hamed Lasram devait trouver sa véritable vocation. Il fut instituteur au Collège Alaoui (1884), professeur à l'Ecole supérieure de langue et de littérature arabe (1909), professeur de traduction et de stylistique au Collège Sadiki et président, après les années de la première guerre mondiale et jusqu'en 1925, de l'Association des anciens élèves du collège Sadiki. (33)

Dans sa deuxième conférence tenue le 19 octobre 1973 devant les étudiants de l'Institut de presse et des sciences de l'information sur "l'histoire du mouvement national", Habib Bourguiba évoqua avec émotion la mémoire de certains de ses professeurs qui l'avaient profondément marqué de leur empreinte : "C'est à M. M'hamed Lasram, dit-il, que revient le mérite de notre formation en arabe classique. Il appartenait à la génération de Bach Hamba. Il était relativement vieux. Corpulent et moustachu, il portait des lunettes et se coiffait d'un fez légèrement penché. Il nous avait communiqué l'amour de la langue arabe, celle des écrivains et des poètes authentiquement arabes. Il n'avait que mépris pour l'expression littéraire moderne, en vogue dans la presse égyptienne. Il ne reconnaissait aucun talent à Taha Hussein, couvrait de sarcasmes ceux qui prétendaient moderniser la langue arabe. Je dois reconnaître que c'est grâce à lui que nous avons appris, depuis, à nous exprimer et à rédiger en arabe classique. Cette langue nous était, auparavant, enseignée, principalement, sous forme de versions diverses..." (34)

 Le regretté Sadok Zmerli, lui-même ancien élève au Collège Sadiki et à l'Ecole supérieure de langue et de littérature arabe, et l'un des membres actifs au sein du mouvement Jeune Tunisien, m'avait parlé, à maintes occasions, de "Si M'hamed". Selon ses propres dires, "cet ancien compagnon de route (il était son aîné de dix-sept ans) avait toujours exercé sur ses condisciples un véritable ascendant. Ses paroles mesurées, émanant d'un esprit méthodique et réfléchi, étaient le plus souvent concluantes et acceptées sans réplique..." Dans sa série de biographies tunisiennes, cet illustre auteur avait d'ailleurs consacré un article sur M'd Lasram, dont je me contente de reproduire ici les dernières lignes : "...son professorat à l'Ecole supérieure d'Arabe et à Sadiki, devait lui procurer la plus grande satisfaction de sa vie : l'amitié affectueuse et déférente de nombreux disciples formés à son école, dont plusieurs occupent aujourd'hui des postes de choix dans les administrations du pays ; et qui se souviendront toujours avec émotion, des heures inoubliables vécues auprès du maître affable et souriant, dont l'unique ambition fut de servir la Tunisie." (35)

  


M'hamed Lasram (1866-1925). (Cette photo m’a été aimablement confiée par le Révérend père André Demeersman (1901-1993) qui m’invita en février 1987 à son bureau à l’Institut des Belles Lettres Arabes (IBLA). Dans ce même bureau, sur le marbre de la cheminée, trônaient les portraits de Abdejelil Zaouche et de M’hamed Lasram).



De g. à d., assis : Md Salah Baccouche, M'd Lasram, Ammar Guellati, Béchir Sfar. Debout : Omar Bouhagib, Khélil Bouhagib, Younès Hajjouj, Mustapha Ben Osmane, Ali ben Ahmed Guellati, Ali Bouchoucha. (Photo originale (46x32 cm) aimablement offerte par M. Nabil Ben Khélil, petit-fils de Y. Hajjuj).

Comité de la Khaldounia (1905) ; de g. à d. Assis : Cheïkh Md Tahar Ben Achour, professeur de 1ère classe à la Grande Mosquée, M'd Lasram, président de la Khaldounia, fonctionnaire, Béchir Sfar, fonctionnaire, Ali Bouchoucha, journaliste. Debout : Kayrallah Ben Mustapha, fonctionnaire, Abdejelil Zaouche, industriel puis fonctionnaire, Rachid Ben Mustapha, fonctionnaire, Abdelaziz Hayouni, fonctionnaire, Ahmed Ghattas, avocat.

Abdejelil Zaouche, Béchir Sfar et M’hamad Lasram présidant l’assemblée organisée à la Khaldounia le 20 juillet 1908)


Hussein ben M’hamed ben Mahmoud (Bach Kateb) (1854-1929). (Sa mère, Mannana, est la fille de Mohamed Louzir, Amine des chawâchiya. Il épousa sa cousine germaine Mahbouba, fille de Mustapha Lasram). Elève à la Zitouna, il obtient le tatwî’ et est recruté en tant que mou’îne (assistant) à la bibliothèque sadikienne de la Grande Mosquée. Il enseigne par la suite à l’Ecole maghrébine (1916) puis à la Zitouna (1919).


Belhassen ben Mohamed ben Ahmed Lasram (1881-1954), (marié à Kalthoum, la plus jeune des quatre filles de Hsouna al-Haddad, née en 1880, décédée en 1937; mère de tous ses enfants). Sa seconde épouse, Néfissa (1897-1990), fille d’Hassan Ben Tourkia, appartient à une famille tunisoise chérifienne originaire de Msaken).

L'un des membres fondateurs de la Rachidiya (troupe de musique traditionnelle créée en 1934),  ce riche mécène apporta un soutien matériel à cette association et mit bénévolement à sa disposition un local, 36, rue du Pacha. A une époque où la musique se donnait habituellement à l'intérieur des maisons, son domicile, Place Romdhane Bey (voir note 25), devient un lieu d'accueil et de rencontre aux poètes, chansonniers, chanteurs et instrumentistes. On y organisait souvent des soirées musicales et des concerts privés, animés par des célébrités, tels que Saliha, Habiba Msika, khemaïs Tarnane, Sadok Thraya...et bien d'autres, en particulier l'étoile de la Rachidiya, Chafia Rochdi, (surnommée Nana) et le fidèle ami "Sidi Ali" Riahi. 


  Patio Dar Lasram, Place Romdhane Bey (photo Houssem Korbosli)  




Durant la saison estivale, Si Belhassen se rendait avec toute sa famille à sa villa du Kram (rue Gambetta, aujourd'hui rue Belhouane). Située en bordure de la plage et entourée d'un vaste jardin, elle est munie d'une loggia offrant une vue panoramique sur le golfe. Une baraque lacustre, perchée sur pilotis et s'enfonçant dans la mer, était réservée aux femmes qui pouvaient se baigner sans être vues. Cette baraque a connu le même sort que bien d'autres qui furent emportées par le violent ouragan de 1930. Ses piliers en bois sont restés longtemps visibles à marée basse au raz du sable.

Au cours de la seconde guerre mondiale, la villa a été réquisitionnée par l'armée de l'Axe pour servir de logement à des officiers italiens. A leur départ, ils n'ont pas manqué de détériorer le mobilier et de piller toute sorte de vaisselle et de bibelots.

Une autre maison, une sorte d'annexe, située rue Mazarin, non loin de la villa, servait de gite à une nombreuse domesticité. Ommi Sallouha y tenait le rôle de gouvernante, assurant avec fermeté l'ordre et la discipline. Au réez de chaussée, une étable était aménagée abritant un couple de chevaux pur-sang, confiés aux soins du cocher "Bouzid".

Si Belhassen, intransigeant sur les principes, garda toujours son savoir vivre à l'ancienne. Respectant les règles de bienséance, sa présence était sollicitée dans les diverses cérémonies officielles ou familiales auxquelles il ne manquait pas de s'y rendre. N'ayant jamais abandonné son costume traditionnel, il paraissait toujours habillé d'une jebba en soie ou en lin et coiffé d'un turban en brocart doré. Il fut aussi l'un des tout derniers bourgeois à se déplacer dans un luxueux carrosse tiré par deux superbes chevaux noirs.

                                                              Belhassen Lasram vers 1936


Famille Belhassen Lasram (photographie prise à Dar Lasram en 1928). De droite à gauche debouts: Abdessalam ben Dahime (Baba Hmida), son père Ahmed Ben Dahime, (récite le Coran en entier par cœur sans jamais se tremper!) ; Chedli Lasram ; Douja (servante de Safia) ; Fatma ghdamciya ; Zohra, épouse Abdessalam ; Béchir Lasram,. Assisis : Safia Ben Achour ; Lella Kalthoum al-Haddad ;  Si Belhassen Lasram, Mamiiya mère de Mohamed Daoud; Assis par terre : Tawizine, Ali Lasram ; Mohamed Lasram ; Habib Lasram ; X.

Mohamed (ben Ahmed ben Hamda ben Mohamed IV) (1875-1960). Grand amateur de musique, virtuose du piano, il animait ses longues veillées en jouant en solo du piano, du clavecin ou de l'orgue des airs dans le style traditionnel, entouré de toute une phalange d'admirateurs et d'amis fidèles. Souvent, ces veillées se prolongeaient jusqu'à une heure tardive. Elles ne s'interrompaient qu’aux premières lueurs de l’aube, au moment de l'appel du muezzin annonçant la prière d'al-fajr, qu'il accomplissait pieusement.

Mohamed Lasram fut surtout connu en tant que l’un des principaux fondateurs de la Rachidia et son premier directeur artistique. Cette association, créée en 1934, organisait des événements musicaux tels que des concerts et des festivals œuvrant pour la promotion et l’appréciation de la musique et du chant traditionnels. Son premier conseil administratif était présidé par Mustapha Sfar, Cheïkh al-Médina. (Ce conseil comptait, en plus des soixante-dix membres, quatre vice-présidents, dont Belhassen Lasram (voir sa biographie ci-dessous).

Mohamed Lasram avait par ailleurs réuni, dans un essai, un ensemble d'articles et de causeries qu'il recopia ou qu’il rédigea lui-même traitant de divers sujets se rapportant à la musique, notamment sa causerie sur la vie de Mohamed Rachid Bey, donnée lors du premier concert de la Rachidia organisé au théâtre municipal de la ville de Tunis (28 mai 1934). (36) La radio tunisienne conserve de lui des enregistrements d'improvisations (istikhbârât, bachârif)) et quelques morceaux tirés du répertoire traditionnel, interprétés au piano. (37)

Il fut aussi l'un des tous premiers tunisiens à s'adonner à la photographie. (D’après un témoignage de son fils Ahmed, il utilisait une caméra modèle Debri Parvo, couvercle en bois). Il laissa un ensemble de portraits de personnes de son entourage familial, vêtus à la mode du début du siècle dernier. Mais son véritable violon d'Ingres a été la confection d'objets précieux en bois, en ivoire ou en ambre gris, tournés et ajourés, d'une grande finesse d'exécution : pupitres de Coran, portes-bijoux, brûles-encens, bras d'éventails, tekka  en bois de cèdre… (38), qu'il aimait offrir, à titre gracieux, à ses proches ou à ses amis.

Md Lasram a eu une première épouse, Fatma, fille d'Ahmed Messaoudi. (39) Il a eu simultanément deux autres épouses, une Sanchou (mère de son fils unique Ahmed Lasram) et une Chabou. Sa dernière femme fut la princesse Hnani (dite Hannouna, fille de Hassine Bey, veuve de Ahmed Gaiji (Hédi) et sœur du Bey régnant Ahmed II, qu’il épousa à la demande de celui-ci). Il décède à Hammam-Lif le 22 février 1961 (17 ramadan 1381), inhumé au Djellez.




Mohamed Lasram (1875-1960), qui, à part ses années de jeunesse, n'a jamais abandonné l'habit traditionnel, avait obtenu le diplôme du tatwî' à la Grande Mosquée et exerça la fonction de notaire puis de secrétaire à l'administration de la Zitouna. Selon les témoignages du journaliste et homme de théâtre Hédi Labidi et le chroniqueur Abdelaziz Laroui, « il fut un mécène et mélomane averti, mais aussi un pianiste de talent ».

 Troupe chorale de la Rachidia (1936) ; au milieu assis Mustapha Sfar (président), à sa droite Cheïkh Md. Lasram, Chafia Rochdi (actrice et chanteuse), Khémaïs Tarnane (compositeur et professeur à la Rachidia).


La Rachidia, de d. à g.  Otman Kaak, Béchir ben Belhassen Lasram, Cheikh Larbi Kabadi (poète et homme de lettres), x,  Jalel-Eddine Naccache (poète), Mahmoud El Bégi (juge et écrivain(. 

Cheikh Md Lasram entouré de musiciens au jardin de Kassar Saïd, là où il résida durant les dernières années de sa vie.  De droite à gauche : Simon (luth), Si Abderrahmane (flûte), Cheikh Md Lasram, Si Zahrouni (tambourin), Si Sadoq, Si Houssine (timbale).

Tabatière en bois de santal, au couvercle marqueté, réalisée par Md Lasram et offerte à son cousin Belhassen Lasram.


Mohamed Lasram ben Hussein, né en 1894 à Tunis, (résidant au n° 8 rue Mohsen), (m. 1965). (Il épousa sa cousine germaine Hallouma, fille de Tahar ben Hamouda, puis Hasna fille de Tahar Bou Jemil). Elève à la Zitouna depuis 1325 / 1907, (il eut pour maîtres, notamment : Othman ben Mekki, Md Salah Ben Mrad, Md Sadok Naïfar, Al-Khadhir Husseïn, Ali Belkhodja, Md Annabi, Belhassan Najjar, Ibrahim Al-Marighni, Md Tahar Ben Achour...) Qayyim (responsable à la bibliothèque sadikienne) (1929). Notaire, professeur à la Zitouna et à son annexe youssefite (1935). Membre de l'Association des Enseignants zeïtouniens, créée en 1937 sous la présidence du Cheikh Ahmed Ayari, dont l'action « syndicaliste » a été de défendre les droits des professeurs zeïtouniens.

    Cheikh Mohamed ben Hussein Lasram (photo Soler, Pavia frères, Tunis).


Cheikh Mohamed Lasram entouré de ses étudiants zeïtouniens, rajab 1367 / juin 1948

Registre du tâlib Mohamed ben Husseïn Lasram

Appréciations du Recteur de la Mosquée Cheïkh Md Tahar Ben Achour,

Joumâda 2, 1344 / décembre 1927 (dernière page, 89).

   Registre du talib Mohamed ben Hussein Lasram. Obtention du Tawi’, 28 dul-qi’da,1335/ 15 sept 1917, p. 85.


Mohamed al-Hahbib ben M'hamed Lasram (1889-1972) (Hammouda, dit Amîra, est son trisaïeul). (Sa mère, Fatma (décédée le 30 mai 1949) était la fille de Mohamed Lahbib ben M'hamed ben Hamouda ben Mahmoud ben Hamouda (Amîra); ses parents sont donc cousins). (Marié en 1940 à Bolbol fille de M'hamed Ben Ghachem). Elève à la Zitouna, il obtint en 1919 le tatwî' (équivalent à la licence) et exerça, à partir de 1921, la fonction de notaire. Installé à la rue Sidi ben Arous, à côté du souk des Chaouachia, son cabinet avait acquis une certaine notoriété auprès des habitants de la Médina. Il obtint le tadrîs de 3è catégorie en 1935, puis de 2è catégorie en 1953 et dispensa au sein de la Grande Mosquée, durant le rectorat du Cheikh Md Aziz Djait, en tant qu'aide-enseignant et sous la supervision des Cheikhs inspecteurs, des cours en fiqh (pratiques cultuelles), en tawhîd (monothéisme) ainsi qu'en calcul et sciences naturelles. Il a été mis à la retraite à compter du 1er octobre 1959, alors qu'il occupait la fonction d'enseignant à l'école zeitounienne Ibn Khaldoun, suite au transfert de l'enseignement de la Zitouna à cette école. C'est en 1927 qu'il effectua son premier pèlerinage à la Mecque en paquebot, puis, en 1954, son second pèlerinage par avion. (40)

 Mohamed Al-Habib Lasram


Mohamed Chedly ben Belhassen Lasram (1908-1968). (Marié à Safia Ben Achour puis à Chama Zaouche). Dirigeant de l’Espérance sportive de Tunis (fin des années 30). Jouant, en dilettante, du luth et du piano, il était surtout un talentueux joueur d'échecs. Il participa, Au début des années 40,  à la compétition qui a eu lieu en Tunisie entre 40 joueurs et le russe Alexandre Alekhine (champion du monde 1927-1935 et 1937-1946). Dans cette fameuse partie simultanée sur 40 échiquiers à l'aveugle, Alekhine avait infligé un échec et mat à 39 joueurs; seul, Chedly Lasram obtint une partie nulle.

Md Chedly Lasram (à gauche) jouant aux échecs avec quelques amis au Café de la Kasba


Mohamed ben Belhassen Lasram (1923-1981) (marié à la princesse Aziza, fille de Ezzeddine Bey et petite fille de SA Md al-Habib Bey). Lauréat du diplôme de fin d'études secondaires du Collège Sadiki (1936), fonctionnaire à la Direction générale des finances, khalifa (fonctionnaire de l'administration régionale, adjoint du Caïd (gouverneur)) (1950-1956) puis délégué du gouvernement (Hammam-Lif, Le Kef et Tunis (1957-1977)).  

   


Mohamed al-Béchir ben Belhassen Lasram (1912-2000). (Marié à Dalenda, fille du Cheikh al-Islam hanéfite Md Taieb Bayram ben Mahmoud Bayram, Mufti hanéfite).

Membre de la section artistique de la Rachidya.

Doué d’une mémoire infaillible, al-Béchir Lasram se distinguait par sa parfaite connaissance du passé de la Médina, des usages et des coutumes de ses habitants, de leurs mœurs et de leurs traditions. Sans jamais les confondre, il établissait les généalogies et les filiations familiales, en citant leurs origines, les ramifications de leurs ascendances et de leurs descendances. Bien des chercheurs, des sociologues et  des historiens, s’adressant à lui,  trouvaient une réponse persuasive et convaincante à leurs questionnements. La fréquentation assidue de mon oncle Si al-Béchir, les documents anciens qu’il mit à ma disposition en sa qualité de liquidateur judiciaire des  biens habous (biens de mainmorte), m’a permis de collecter des renseignements précieux, notamment sur ma propre famille. Tout un ensemble de données, qui risquent aujourd’hui de disparaitre de la mémoire d’une jeunesse le plus souvent indifférente et désintéressée, m’ont été utiles pour la réalisation de cette présente étude.

 Durant plusieurs années, al-Béchir Lasram se chargea bénévolement de la collecte de toutes sortes de biens matériels (mobilier de bureaux, denrées alimentaires, vêtements, articles de sport, bandes de films..) servant aux diverses associations qui ont été fondées par Cheikh Md Salah al-Neïfar, auquel il a toujours voué une déférente amitié. Trésorier de l'association sportive "an-nach' ar-riyâdhî" (1930), des jardins d'enfants, de la Maison du nourrisson et de la section de scouts; Il dirigea quelque temps l'Ecole de la fille musulmane, rue Serrajine, créée en 1947.

Homme de foi, adepte de la tariqa d’Abou al-Haçen al-Chathouly, apprécié unanimement pour sa piété et son altruisme, il entretenait un indéfectible attachement à l’égard de certains honorables cheikhs zeitouniens qui sollicitaient sa présence à leurs réunions hebdomadaires.  

Md al-Béchir Lasram

(Le 9 septembre 1942, Moncef Bey accompagné de sa suite, rendait visite au Kram à l’occasion de l’inauguration de la nouvelle mosquée de cette localité. Une fois installé au Mihrab, on lui présenta un coussin qu’il refusa et préféra s’assoir comme tous les sujets sur les nattes en toute humilité. S’adressant à M. Béchir Lasram, membre du comité d’accueil, il rétorqua qu’à la maison de Dieu, il n’y a ni privilège ni favoritisme entre les fidèles !) (41)

M. Béchir Lasram, membre de la cérémonie d‘accueil, à l’occasion de l’inauguration de la mosquée du Kram en compagnie du Président de la Municipalité de La Goulette et du Contrôleur civil ; derrière eux Haj Ali Trabelsi, mu’addib (précepteur).


Mohamed Ali ben Belhassen Lasram (1919-2005); (. Marié à Frida, fille du Cheikh al-Islâm malékite Md al-Aziz Djaït ben Youssef Djaït (Premier Ministre de S A. Md al-Naceur Bey).

Mudarris (enseignant à l'Université zeïtounienne); professeur d'histoire et de pensée islamique au Lycée de la rue du Pacha, durant sa jeunesse, il fréquenta l'association sportive de la Nasriya et assista assidument aux séances littéraires animées par le grand érudit et poète Arbi Kabadi (42).

Lors des élections législatives de 1989, il a été élu président de la liste indépendante de Tunis II, arborant la couleur violette. (43).

    Cheikh Md Ali Lasram   


Abdelaziz ben Md Chedly Lasram (1928-2017). (Sa mère, Safia, est la fille du Cheikh Md Tahar ben Achour, ancien Recteur de l'Université de la Zitouna). (44). 

Il entra à l'ENA en 1956 (promotion18-juin) et en sortit en 1958, en même temps que Michel Rocard et Jacques de Larosière qui furent ses camarades et avec lesquels il se lia d’amitié. 

Ministre de l'Économie nationale (1974), il démissionna, en 1983, en raison de la suppression des subventions de la caisse de compensation de certains produits de première nécessité, notamment le pain, avec, à l'appui, un plan sur dix ans visant l'extinction définitive de cette caisse, ce qu'il considéra comme impopulaire et susceptible de porter un coup sérieux à la paix sociale. Il avait vu juste, puisque trois mois plus tard éclatèrent "les émeutes du pain".

Pratiquant plusieurs activités sportives (chasse, pêche sous-marine, football), il prit à deux reprises la direction du Club africain (1964-66 et 1971-77) (45).

 Le Temps - Finale de la Coupe 1973-74



 Mustapha, aîné des quatre enfants du Cheikh Mohamed Lahbib Lasram et de Bolbol Ben Ghachame, est né en 1941. Il est marié à Raoudha bent Abdelhamid Thameur.

Ingénieur Agronome diplômé de l’École Nationale Supérieure Agronomique de Toulouse et titulaire du Diplôme de spécialité de l’Office de la Recherche en Sciences et Techniques d’Outre-Mer en Biologie et Amélioration des Plantes Utiles, Paris, il a commencé sa carrière en Tunisie à l’Institut National de la Recherche Agronomique de Tunisie (INRAT) en qualité de chercheur (1969-1978), puis a été nommé Directeur général du même institut (1978-1991).

Il est, depuis 1989, membre associé de l’Académie d’Agriculture de France.

Il a été élu en 1991 Secrétaire général du Centre International de Hautes Études Agronomiques Méditerranéennes (CIHEAM), dont le siège est à Paris, poste qu’il a occupé jusqu’en 1997. Ce Centre qui associe treize pays méditerranéens, dont la Tunisie, offre une formation post universitaire dans ses quatre Instituts Méditerranéens situés à Bari, Chania, Montpellier et Saragosse.


Réunion du Conseil d’Administration du CIHEAM à Chania, Grèce

Mustapha Lasram, Secrétaire général au côté d’Edgard Pisani, Président du Centre.


A son retour en Tunisie, il a réintégré le Ministère de l’Agriculture en qualité de Chargé de mission au Cabinet du Ministre de l'Agriculture, puis au Fonds National de l’Emploi (1997-2003). Il a été aussi membre du Comité National d’Évaluation des Activités de Recherche Scientifique (1998-2006) et membre, vice-président, du Conseil de surveillance de la BNA, (2001-2004).

Durant sa carrière, il a été membre du Conseil d’Administration de l’International Center for Agricultural Research in Dry Areas (ICARDA), Alep, Syrie (1980-1986) ainsi que du Conseil de l’Arab Center of Studies on Arid Zones and Dryland (ACSAD), Damas, Syrie, (1988-1990).

Il a participé à de nombreuses études ou groupes de réflexion avec divers organismes nationaux, régionaux ou internationaux : CNEA et OTEDD/GIZ (Tunisie), ISNAR (La Haye, Pays-Bas), CIP (Lima, Pérou), CIMMYT (Mexico, Mexique), FAO (Rome), et, Commission européenne (Bruxelles).

Mustapha Lasram a élaboré en 2015 un livret relatant l’histoire de la Famille Lasram et du Palais Dar Lasram de la rue du tribunal. Il a présenté le contenu de ce livret au Centre Zmorda, dirigé par sa sœur Khadija, en présence de nombreux membres de la famille.



Zoubeir fils de Mahmoud ben Tahar Lasram et de  Zeinab, fille de Sidi Hamda Chérif (Premier Imam à la Mosquée de La Zitouna).

Né en 1947; Artiste plasticien ayant participé à diverses  expositions  de groupe. Il monta une exposition personnelle à la Galerie Hamadi Chérif à Sidi Bou Saïd, intitulée "Paroles de paraphes" (2013). Titulaire d'une thèse en Histoire de l’Art à la Sorbonne Paris 1, intitulée « Naissance d’un langage, et élaboration d’une identité picturale en Tunisie, Approche sociologique » (1979). Professeur d'histoire de l'art à l'Ecole des Beaux-Arts de Tunis (1980-2012). Auteur d'ouvrages et articles sur des peintres tunisiens (H. Turki, Z. Turki, R. El Kamel, H. Soufi). Auteur du texte d'un film sur A. Gorgi, réalisation Hmida Ben Ammar, Tunis 2002. Directeur, à partir de 2015, du festival ramadanesque de la Médina de Tunis (organisant des concerts, récitals et spectacles).


Sayfallah, frère puiné de Zoubeir. Sadikien. Diplômé de la faculté des lettres et sciences humaines 9avril, il intègre l'Office National de Tourisme récemment créé pour assoir une stratégie de développement de secteur touristique en Tunisie. Il y passa pratiquement toute sa carrière professionnelle dans différents postes. A l'étranger et plus précisément en Allemagne, il exercera pendant dix années à la tête de la représentation à Frankfort.

Rappelé au siège à Tunis en qualité de directeur général adjoint, il sera désigné Président Directeur Général de l'Agence Foncière Touristique, puis Directeur général de l'Office National du Tourisme puis chargé de mission au cabinet du ministre. Parallèlement à ses fonctions, il a fait partie de la 17ème promotion de l'Institut du Conseil économique et social.

Sa carrière administrative était couronnée par sa désignation Maire de la capitale. En sa qualité, il assurait la présidence de la Fédération  Nationale des villes tunisiennes. Ses responsabilités l'ont appelé à occuper un siège au Bureau Exécutif de l'Association Internationale des Maires francophones (Paris) et au bureau exécutif de l'association des capitales et villes Arabes (Koweït). 


Sayfallah aux cérémonies du 14 juillet 2012 à Marseille


Heythem  Lasram fils de Md ben M'hamad Lasram et de Emna Bahri (marié à Emna Naouar). Journaliste présentateur de la radio-télévision, attaché de cabinet au Ministère des affaires étrangères au temps de feu Bégi Caid Essebsi et Mahmoud Mestiri. Directeur de l'information au sein du même ministère  au temps de feu Hédi Mabrouk, puis conseiller de presse à l'Ambassade de Tunisie à Paris. Il fut nommé en février 2011 Directeur de RTCI.


Abdelaziz ben Tahar ben M'hamed Lasram, Formé à l'Institut National agronomique de Tunis (Ingénieur spécialiste en Océanologie biologique) (1984-1989). Il obtient un DEA dans cette spécialité à l'Université de Bretagne occidentale (1986). Responsable du développement commercial "Afrique du Nord OTV", Responsable commercial export chez "VA Tecch Wabag" (2004-2005), Chef de service protection du milieu marin chez "Agence Nationale de protection de l'environnement, Tunisie", traitement des eaux (1989-1991).


Anas fils de Salaheddine ben Mohamed Ali Lasram et de Amel Férah, né le 27/02/1985. Il a obtenu en 2012 un doctorat à l'Université de Lorraine, spécialisation "informatique graphique". Au cours de ses études supérieures, il a exploré le domaine du rendu photoréaliste et en temps réel et a publié des articles dans les plus prestigieuses revues et conférences scientifiques de l'informatique graphique telles que "SIGGRAPH", "SIGGRAPH Asia", "Eurographics" ou "High Performance Graphics".Entre 2013 et 2018, il a travaillé comme ingénieur chez "Advanced Micro devices" en développant des modèles d'architecture, des outils de performance et des pilotes pour les processeurs graphiques "AMD Radeon". Ces processeurs incluent les processeurs graphiques "Radeon Tahiti", "Fiji", "Vega" et "Navi" ainsi que les processeurs graphiques utilisés dans les consoles de jeux vidéo "Sony Playstation 4","Sony Playstation 5", "Microsoft Xbox One" et "Xbox série X". Chez "Advanced Micro Devices", il a également aidé plusieurs développeurs de jeux à intégrer les dernières technologies graphiques et les optimisations de processeurs graphiques dans leurs jeux. Il a travaillé avec de nombreux développeurs dont "Activision", "Blizzard", "Bungie", "Microsoft Games" ou encore "Electronic Arts".Depuis 2018, Anas Lasram s'est intéressé aux technologies de conduite des voitures autonomes. Il a travaillé chez "Tesla" en 2018 et 2019 et a développé des logiciels de simulations pour la technologie "Autopilot" utilisée dans les voitures "Tesla". Après "Tesla", il a rejoint la filiale d'"Amazon Zoox" et a travaillé sur des simulations avancées pour un service de taxi robot entièrement autonome. Un tel service devrait se commercialiser dans les années à venir.


Souad (1930-2020), fille de Md Chedli ben Belhassen Lasram et de Safia Ben Achour ; sœur cadette d’Abdelaziz Lasram. Elle adhéra à l'UNFT dans les années 60 et fit partie de la première délégation féminine tunisienne aux Nations Unies avec Radhia Haddad. Elle s'occupa, au Ministère de l'Information, des Relations publiques (accompagnements de journalistes et de personnalités en visite en Tunisie). Elle participa, dans les années 70, à l'émission radiophonique animée par Donia (Neïla Ben Ammar) intitulée "Hissat al-Mar'a" (le Magazine de la femme) dans laquelle elle diffusa une série d’entretiens qu’elle mena avec des personnes de notoriété mal connues du public. Elle écrivit notamment, de 1977 à 1981, une rubrique dans le journal « Amel »  (Jouhayna). En dilettante,  elle égayait de sa belle voix ses soirées familiales en jouant du luth.


Kédija, fille du Cheikh Mohamed al-Habib Lasram et  épouse du Docteur Abdessalem Kammoun (professeur de radiologie). Agrégée en lettres arabes et férue d'art et de littérature, elle dirigea à partir de 1987 et durant une trentaine d'années le Club Tahar Haddad (annexe de Dar Lasram, rue du Tribunal, (lieu de sa naissance). (Il s'agit d'un centre culturel très actif abritant une bibliothèque et où se produisent des peintres, des musiciens et chanteurs, des poètes et des acteurs tunisiens et étrangers). Jouant du luth, Khédija hérita sa passion de la musique de sa mère qui jouait elle-même du piano. Elle fit partie, depuis 1994, du jury du prix Zoubeïda Bchir, dédié aux écrivaines tunisiennes. Elle fonda, à Soukra (banlieue nord de Tunis), le "Centre Zmorda", un espace agréable destiné au sport, aux loisirs et à la relaxation, ayant surtout une vocation culturelle (expositions d’œuvres d'art, conférences, art culinaire)). (Cf. Zohra Abid, "Khedija Kammoun : L'art de partager", WWW. tunisia-today.com>archives, actualités de la Tunisie).

En sa qualité de Vice-Présidente du Maire de Tunis chargée des relations internationales, Khédija Lasram Kammoun, représentant la ville de Tunis, a été déléguée par Monsieur le Maire, Abbas Mohsen, pour participer à un grand congrès ("Les villes classées patrimoine mondial"). Le Président Jacques Chirac a invité les participants à un déjeuner à l'Elysée.


Notes et Références


1. Ibn abi-Dhiaf, " Ithâf" (Présent des hommes de notre temps. Chroniques des rois de Tunis et du pacte fondamental), Maison Tunisienne de l'Edition, Tunis, 1966, VII, p. 51. / Dans certains actes (de partage, de propriétés, de mariage ou de décès, notariés ou sous-seing privé, le nom de famille Lasram est quelquefois suivi du qualificatif al-ansârî al-khazrajî (attribué aux ansâr, partisans du Prophète, issus des deux tribus médinoises, les Aws et les Khazraj, dont l'ancêtre commun est Qahtân, roi du Yemen). / Ahmed ben Mohamed al-Habîb Lasram débute l'un de ses poèmes panégyriques, adressé à Ali Bey II, par ces quelques vers glorifiant ses propres origines (traduction un peu forcée) : "Nous, les Yéménites, sommes haut placés. Notre maison est réputée et Qahtân est notre ancêtre (...) Nous sommes les premiers à avoir accordé assistance au Meilleur des hommes et nous l'avons protégé, Lors même que les 'Adnâne  l'ont livré à l'ennemi. Les Aws et les Khazraj, ces seigneurs et nos parents, Se révèlent les jours d'épreuves ingénieux et vaillants batailleurs..." ; Md Baïram IV, "al-Jawâhir as-saniyya" (poètes de Tunisie), éd. al-maktaba al-'atîqa, 1973, pp. 258-2261.


2. En l'an 144 / 762,  Mohamed al-Ach'ath al-Kuzâ'i, premier gouverneur de Kairouan entreprit la construction de remparts afin de mieux fortifier la ville. Ces remparts étaient à cette époque munis de six portes : Bâb Abi Rabi', Bâb Abdallah, Bâb Nâfi', Bâb Tûnis, Bâb Salm et Bâb Asram. Cette dernière porte, située au sud-ouest de Kairouan, servait autrefois de passage vers le chemin menant à la ville princière de Raqqâda (IXè s.). Ayant subi, au cours du temps, plusieurs transformations, les murailles actuelles remontent aux travaux ordonnés par les souverains husseinites, réalisés entre 1706 et 1772.


3. Le noyau central de la ville de Kairouan, situé intra-muros, comprend "Houmet al-achrâf" (quartier où résident encore de nos jours quelques familles descendantes des fondateurs de la ville sainte qui participèrent à la conquête de l'Ifriqya au VIIè siècle), ainsi que "Houmet al-Bey" (du nom de Hussein Bey, qui fonda au XVIIIè siècle, lors de sa réclusion dans la ville de Kairouan, une kasba (chef-lieu) où il résida). Après l'Indépendance, ces deux quartiers prirent le nom commun de "Houmet al-ansâr". C'est à proximité de la Mosquée du Bey et jouxtant Dar Laouani que se trouve l'ancienne maison des Lasram. (Mohamed ben Ahmed Lasram se chargea, à la fin du XIXè siècle, de sa vente).


4. Durant la répression pachiste qui s'est abattue sur la ville de Kairouan, d'autres familles se sont alliées au parti légitimiste, comme les Mrabit et les Chahed (de Kairouan) et les Jallouli et les Bou Attour (de Sfax). Elles allaient occuper par la suite, sous le règne des Husseinites, des charges importantes.


5. Pour plus d'informations concernant la famille Lasram : cf. Carl Brown, « The Tunisia of Ahmed Bey », Princeton University Press, 1975, pp.79-82 ;  Mohamed El Aziz Ben Achour, « Catégories de la société tunisoise dans la deuxième moitié du XIXème siècle », Institut national d'archéologie et d'art, Tunis, 1989, pp. 176-178 ; Sophie Ferchiou [sous la dir. de]nasab : parenté, , « Hasab wa alliance et patrimoine en Tunisie », éd. CNRS, Paris, 1992, pp. 124-125 ; Taoufik Bachrouch, "Mawsû'at madînat tûnis" (Encyclopédie de la Médina de Tunis), Centre d'études et de recherches économiques et de sociales, série historique n°8, 1999, p.58-59; Mustapha Lasram, "Histoire de la famille Lasram et de Dar Lasram (rue du Tribunal)", (Eléments collectés et compilés par Mustapha ben Cheikh Md Habib Lasram, décembre 2015).


6. L'arbre généalogique qui a été  établi, au début du siècle dernier, par mon grand-père, Belhassen Lasram, fut complété, en août 1970, par mon oncle Md Béchir (1912-2000) et par moi-même. Adoptant une représentation sous forme de diagramme circulaire (dite de cujus), la généalogie ascendante est placée à la racine de l'arbre. La personne souche, Md al-Habîb ben hâj Alî ben Omar (né à Kairouan v. 1680), étant au milieu, les descendants, répartis sur neuf générations, sont placés tout autour. (Le plus jeune parmi tous les membres qui figurent dans ce document, Salîm ben Mustapha Lasram, est né le 11 septembre 1970). Si nous avions réalisé ce document manuellement, le regretté Sadok ben Mhamed Lasram (1918-2005) l'avait repris, en 1998, en ayant le mérite d'avoir utilisé l'outil informatique qui lui avait permis une présentation plus conforme et plus complète. Actuellement, Mustapha Lasram prit pour tâche de poursuivre le travail réalisé par son oncle Sadok, en y rajoutant les nouvelles générations. Cf. Mustapha Lasram (archives) sur académie-agriculture.agriculture.fr (consulté le 23 décembre 2015).


7. Cf. Mohamed Bayram IV : “Al-Jawahir al-Saniya fi chou’ara ad-diyar at-tounousy”, Al-Mataba al-‘Atiqa, Tunis 1973, pp. 257-285.


8. Cf. Mohamed Boudhina, "Dîwân al-mâlûf" (Recueil du malouf), Cérès Productions, 1992. (L'auteur commet une confusion de noms (p. 19) : il s'agit bien d’Ahmad Lasram, connu en tant qu'homme de lettres et épris de musique, plutôt que de son frère "Mohamed").


9. Cf. Mohamed Seghir ben Youssef, "Chronique tunisienne", éditions Bouslama, Tunis1978, pp. 403-404.


10. La milice des Zwâwa était composée de soldats berbères, recrutés en Kabylie et                     ayant souscrits un engagement volontaire. Ce corps militaire, réputé pour son courage, était  chargé d'accomplir les tâches inhérentes aux forces armées. Cf. Mongi Smida, " Les Zouaoua, une colonie kabyle en Tunisie au 19è s.", éd. Tunis Carthage, sd. ; Chadly Ben Abdallah, Connaissez-vous les Zouaoua ?, «La Presse de Tunisie », octobre 1995, p. 2.


11. A propos de Md Lahbib Lasram, cf. Md. Senoussi, "Musâmarât ad-dharîf", Dâr al-Gharb al-islâmî, 1994, vol. 4, p. 36 - Md Bayram IV, "At-tarâjim al-muhimma lil-khutabâi wal aimmah", Sotapa Graphic, Tunis, 2003, p. 18.


12. Au cimetière du Djellaz, trois tourba ont été consacrées à chacune des trois branches de la famille Lasram. La plus ancienne réunissait les tombes d’Ahmad, de ses fils et petits-fils, ainsi que de son frère Mohamed Ier. Abandonnée depuis longtemps et livrée au pillage, son enceinte a été détruite et il n'en reste aujourd'hui aucune trace. Située à quelques dizaines de maîtres de celle-ci, la seconde tourba avoisine la Kobba de Lella Kébira Mamia (d. 1747, épouse de Ali Pacha) et se trouve à proximité du mausolée de Sidi Belhassen. Surmontée de trois voûtes croisées, elle contient les tombes de Mohamed III et de ses descendants. La troisième tourba est celle de Mahmoud Bâch Kâtib et de ses descendants, située à peu de distance de la porte d'entrée du cimetière, chemin Belhouane. Sur les pierres commémoratives des tombeaux en marbre ciselé, sont gravés des poèmes panégyriques ou élégiaques qui peuvent contenir des renseignements utiles sur certaines personnes disparues ; j'ai dû moi-même, guidé par un sentiment de conservatisme  et de préservation du patrimoine, recopier patiemment les textes des inscriptions existantes. Cependant, au cours des années 80, des bandes de jeunes forcenés, emportés par le courant impétueux du fanatisme, se voulaient être les défenseurs d'un islam rigoriste et intransigeant. Considérant l'édification et  surtout l'embellissement des pierres tombales comme un sacrilège, Ils commirent impunément des actes de barbarisme et de profanation, en saccageant un certain nombre de ces tombes. (Cf. Général Bel Khodja, Cobbet Mamia, in "La Revue Tunisienne",191,pp.163-173).

Zouaoua ?, "La Presse de Tunisie", 23 octobre 1995, p. 2.

 Le mont de la zaouiya de Sidi Belhaçen ; à ses côtés la Tourba de Mamiya et la tourba des Lasram. En arrière plan, le lac de Tunis. (photo prise en 1846). 

  

13. Dar Lasram a été occupée par les descendants de Hammouda jusqu'en 1967. Mis en vente, elle entra dans le domaine communal et fut affectée, sous l'impulsion du maire de Tunis, Hassib Ben Ammar, à l'Association de la Sauvegarde de la Médina qui procéda à son réaménagement. En 1974, le rez-de-chaussée, qui servait de Makhzen, fut aménagé en espace d'animation culturelle (Club Tahar Haddad) abritant des expositions de peintures,  des tables-rondes, des représentations théâtrales et musicales et une bibliothèque. (Cf. Jacques Revault, "Palais et demeures de Tunis (XVIIIè-XIXè siècles", éditions du CNRS, 1983, p. 350-352 ; Jamila Binous, "Maisons de la Médina, Tunis", Dar Ashraf éditions, (Dar Lasram, pp.114-124, Club Tahar Haddad, pp. 125-127) ; Mustapha Lasram, op. cit., pp. 17-24 ;  Md Khaled Hizem, Dar Lasram, un fleuron de la médina de Tunis, "La Presse Magazine", 28/08/2016).


14. Cf. Revault, 1983, op cit, p. 225.


15. A propos de l'envoi de la "sourra" (bourse) (prélevée sur les propriétés haboussées et envoyée annuellement aux populations des deux villes saintes), cf. Tlili Ajili, "Les biens habous des deux villes saintes en Tunisie (1731-1881)", éd. Brill, Pays-Bas, 1998.


16. Cf. Jean Gagniage, "Les origines du protectorat en Tunisie (1861-1881)", MTE, 19, (La toute-puissance de Mustapha Khaznadar), pp. 78-87.


17.   Dans un climat de tension entre personnages proches de la cour, il y avait une certaine   animosité non seulement entre le Khaznadar et le Bâch Kâtib, mais aussi entre celui-ci et Ibn abi-Dhiaf. La fameuse qacîda sînia (poème dont la rime se termine en s), qu'avait si   éloquemment déclamée Mohamed Bâch Kâtib en présence d'Ahmed Bey et de ses ministres, et dans laquelle il dénonça les "conspirations" (makâid) fomentées par Mustapha Khaznadar et Ahmad Ibn abi-Dhiaf, ne semble point avoir eu le moindre effet escompté. (A propos de cette qacîda, cf. Mohamed Senoussi, "Majma' ad-dawâwîn at-tounisiyya" (Receuil des diwân tunisiens), (l'auteur avait réuni dans ce volumineux ouvrage des biographies et des vers de plus de quatre-vingt poètes tunisiens ayant vécu sous la dynastie husseinite), manuscrit conservé à la B. N. de Tunis (n° 1666422, 188-177); cf.  Mohamed an-Naïfar, "'Unwân al-Arîb", imprimerie tunisienne, 1932, t. 2, pp. 115-117). / Si le Bâch Kâtib avait exprimé ses ressentiments aussi bien envers le Khaznadar qu’envers Ibn Abi-Dhiaf, c’est que ce dernier était le protégé du puissant ministre. On ne trouve d’ailleurs nullement dans la Chronique d’Ibn Abi-Dhiaf la moindre allusion sur toutes les malversations  qui ont été commises par le Khaznadar. Cependant, au lendemain de la révolte de Ben Ghedhahem (1864), les relations entre Ben Dhiaf et le Vizir se détériorèrent. D'après M. Kraïm, «...ce refroidissement dans les rapports entre ces deux hommes d'état s'expliquait fondamentalement par le parti pris politique des deux ministres. Le chroniqueur demeura fidèle au maintien du Pacte Fondamental. Le Khaznadar au contraire, après avoir établi sa totale domination sur le bey provoqua la suppression de l'expérience constitutionnelle. », Mustapha  Kraiem, " La Tunisie précoloniale", STD, 1973, t. 1, p. 364.

Dans ses lettres envoyées au Minstre Kereddine, Ben Diaf ne cache pas son ressentiment envers le Bach Kateb Mohamed Lasram , chaque fois qu’il évoque son nom,  l’accusant de malveillance et de mauvaise foi. (Voir «  Raçail Ibn Diaf » (Lettres de Bin Diaf)  envoyée au Général Kereddine, in « Ithaf », op. cit., vol. 6, pp. 195-275 .  


18. Parmi les familles "makhzen" qui ont occupé depuis des générations des fonctions dans la chancellerie beylicale, les Bou Attour.  Cf. Md an-Naïfar, op. cit., t. 2, p. 181. ;  Mhamed Ibn al-Khodja, "Safahât min tarikh Tunis" (Pages choisies de l'histoire de Tunisie), Dar al-Gharb al-Islami, Bayrouth, 1986, (biographie du Cheïkh Md al-Aziz Bou Attour), p. 428.


19. Cf. Ibn abi-Dhiaf, op. cit., VIII, p 116.         


20. Féru de poésie et de musique, Mohamed IV avait aménagé dans sa  résidence de Sidi Bou Saïd une dépendance baptisée " Dar al-awâda" (au sens littéral : Maison des luthistes) pour y recevoir ses invités. 

 La tour (kchok, jawsaq) de Dar Lasram à Sidi bou Said

"Bien connus pour leur talent de musiciens, écrit J. Revault, les Lasram aimaient y organiser, aussi bien qu'à Tunis, rue du Pacha, des réunions musicales groupant familiers et amis."; Jacques Revault, "Palais et maisons de plaisance à Tunis et dans ses environs", Cérès Productions Edisud, 1984, p. 60 ;  Achraf Azzouz et David Massey, "Maisons de Sidi Bou Saïd", Dar Ashraf éditions, 1992, p. 58-67.

Dans son livre "Musique et Société en Tunisie", Mustapha Chelbi rapporte que Ahmed Bey fit appel à des professeurs italiens, notamment à Giuseppe Verdi qui, précise-t-il,  "collabore avec Cheykh Lasram pour composer des marches militaires" (éditions Salommbô, 1985, p. 40). Or l'historien Othman Kaak, cité par Salah Mehdi, n'a nullement  évoqué le nom du Cheïkh Lasram, en affirmant que la musique de l'hymn national : Salâm al-Bey (Salut beylical), chanté à partir de 1846 à la gloire du souverain, a été composée par Verdi. Cependant, le maestro Salah Mehdi semble même contester la participation de Verdi ; selon lui,  en toute logique, le compositeur en question doit plutôt être un Tunisien, puisque l'hymne suit une gamme typiquement tunisienne. Dans ce cas, on est en droit de se demander qui pourrait-être ce compositeur ? 

Cf. Mohamed Khemakhem, "La musique tunisienne traditionnelle", thèse universitaire, Sorbonne,1976,pp.20-24).

 Mon oncle Bechir Lasram opte pour un autre avis: d'après lui, ce serait Giuseppe Donizetti (1778-1856), (frère aîné du compositeur italien Caetano Doniretti) qui était lui-même instructeur général de la musique d'harmonie impériale à la cour du sultan Mahmoud II,  qui aurait composé le premier hymne national tunisien offert au Bey  Ahmed 1er.


21. Cf. M.A. Ben Achour, op. cit., pp. 267-268.


22. Dans un rapport inédit, daté du 19 mai 1872, intitulé : "Causes du désordre financier : le Khaznadar et autres", François Villet, Vice-président de la Commission financière du Gouvernement tunisien, note à propos des malversations commises par le Premier Ministre Mustapha Khaznadar, que "Lorsqu'une personne riche mourait, sidi Mustapha mettait toute son œuvre pour entrer en partage avec les héritiers, s'il y en avait, et en s'attribuant la plus grosse part; s'il n'y avait pas d'héritier, il devenait souvent l'unique possesseur de tous les biens du défunt. C'est là un genre d'exaction si étrange que l'on y croirait difficilement si des faits propres n'étaient pas cités..." (L'auteur présente par la suite quelques-uns de ces faits : entre autre, l'héritage de haj Hassan Snan, les propriétés laissées par Umar Bey, par haj Hassen Sakisly ou par ben Azzouz, caïd de Drid, la fortune de Hmida Chebali). "Le ministre, poursuit-il, s'empara d'une quantité considérable de pierres précieuses faisant partie des biens du Shaykh Bâch Kâtib al-Asram;  il est vrai qu'il couvrit cette spoliation par une espèce de consentement arraché sans peine au fils du défunt qui était presque aliéné. Peu de temps après s'être arrangé de manière à faire entrer ce fils d'al-Asram dans les fermes de l'état, le conduisit rapidement à une ruine complète et par des moyens qui firent tomber entre ses mains une nouvelle et forte partie d'une fortune qui a été l'une des plus considérables de Tunisie. Le malheureux al-Asram fut forcé de se réfugier dans la zaouia ("asile") de Sidi Abû Sa'îd al-bâgî." Cité par Ali Chenoufi : "Le Ministre Khéreddine et ses contemporains  - XIXè siècle", Fondation Nationale, Carthage, Beït Al-Hikma, 1990, p. 75.


23.  Cf. Mohamed Senoussi, "Khoulâsat an-Nâzila at-Tounisiyya" (Précis sur la Question tunisienne), analysé et annoté par Md Sadok Bessaïs, MTE, 1976. /  L' "Affaire des eaux" de 1885 fut la première manifestation des habitants de Tunis contre le régime du Protectorat français. Le mercredi 6 mai 1885, un cortège de 3000 Tunisiens environ, conduits par des notables, se sont rendus auprès d'Ali Bey III à La Marsa afin de lui remettre leurs doléances. Les manifestants ont rédigé une pétition à l'attention du Bey qu'ils confièrent au Grand Vizir Md al-Aziz Bou Attour.  

                             

24. Cette anecdote m’a été rapportée par mon oncle Béchir Lasram.


25.  Ce palais a été édifié vers 1690 par Romdhane Bey (Bey de Tunis de 1696 à 1699). Plus tard Ali Pacha s'y installa ; il le quitta furtivement au moment de sa fuite au Djebel Oueslet (1726). Mustapha Bey l'offrit à son ministre Mustapha Agha. Habité au cours du XIXè s. successivement par les familles Kaddour, Riahi, Lasram et, dans une aile du palais, par la famille Jouini. Mohamed ben Ahmed Lasram l'avait acheté vers la fin des années 1880. Son fils Belhassen y avait entrepris, de 1925 à 1930, de grands travaux de restauration, en installant une grille de protection au-dessus du patio et de nouveaux revêtements de marbre. "L'ancienne ornementation des murs et des plafonds jugée démodée a été complètement rénovée". La salle d'apparat de l'étage "a été l'objet de soin particulier. Les artisans auxquels en a été confié la décoration se sont efforcés visiblement d'imiter le style d'inspiration italienne". Les anciens panneaux de faïence qui lambrissaient les murs des appartements ont été récupérés, et ornent jusqu'à ce jour la façade du Palais de Justice. Le palais conserve encore ses écuries, un beau bâtiment à voutes et à colonnes. Jacques Revault, "Palais et demeures de Tunis (XVIè et XVIIè siècles)", Editions du CNRS, 1980, p. 244-257. Cf. Leïla Ammar, "Histoire de l'Architecture en Tunisie, de l'Antiquité à nos jours", édité à compte d'auteur, Tunis, 2005: le Dar Ramadhane Bey à Tunis, 1696, rue Bir Al Hajar, pp. 185-186. (Le palais a été acquis  par l'Etat en 1962).

       Dans le cadre du projet Dar al-Malouf, l'Association "Aswar al-Médina" a mené, depuis le 13  janvier 2017, une campagne appelée "Tous pour la Rachidia". Dar Lasram, rue Bir Lahjar, dont la cour intérieure est actuellement en cours de remise en bon état, a donc été choisie en tant que deuxième local de la Rachidia (le premier étant celui de Dar Daoulatli située à la rue Driba, à proximité de la rue Sidi Ben Arous). Ce deuxième local est destiné à abriter une bibliothèque digitale et un ensemble important de documents d'archives, soigneusement triés, se référant à la musique andalou-tunisienne. Une salle  sera réservée à une exposition permanente de vieux instruments de musique traditionnelle.


Palais Lasram, rue Bir Lahjar, paré d'un balcon de style arabisant.


26.  Paul Bourde (1851-1914). Envoyé en Tunisie en 1890, il est nommé directeur des Renseignements et du contrôle de l’architecture puis directeur des contrôles civils. Grâce à Son éducation terrienne, la culture de l’olivier a pris son essor dans la région de Sfax.


27. La solide amitié qu'entretenait Mhamed Lasram avec Paul Bourde lui permit de nouer, par son intermédiaire, des liens avec René Millet, Résident Général de France en Tunisie. M'd Lasram parvint en effet  à  convaincre ce dernier de l'utilité que pouvait amener la création de la Khaldounia, en obtenant son accord et son soutien. (Cf. Md Fadhel Ben Achour, "Tarâgim al-A'lâm" (le président Mhamed Lasram), MTE, Tunis, 1970, pp. 235-246). Notons au passage que René Millet, qualifié par certains de "Résident humaniste", dût, au cours de son mandat (1894-1900), affronter l'hostilité des gros colons qui lui reprochaient son "arabophilie" et "sa politique trop favorable aux Tunisiens". Il réalisa d'ailleurs de grands projets en dotant le pays d'importantes infrastructures, notamment, sous l'impulsion de sa femme, la création de la première école de jeunes filles musulmanes : l'Ecole Louis-Renée Millet (rue du Pacha).


28. Victor Serres et M'd Lasram ont notamment traduit en commun  deux ouvrages importants: le premier, celui de Mohamed Seghir ben Youssef : (Machra' Malki) "Chronique tunisienne (1705-1771) pour servir à l'histoire des quatre premiers Beys de la famille husseïnite", paru de 1896 à 1900 dans la Revue Tunisienne, sous le titre "Soixante ans d'histoire de la Tunisie" ; édité en un seul volume en 1900  (réédité en 1978 par Bouslama. Le texte original en arabe a été imprimé en partie : 1er volume (1998),  3è volume (2009)), le second ouvrage est celui de Mohamed ben Othman Hachaïchi : "Voyage au pays des Senoussia à travers la Tripolitaine et les pays touareg", Augustin Challamell Editeur, Paris, 1903.


29. Le terme "indigène", note Ch-A. Julien : "Les Jeunes Tunisiens l'emploient constamment sans se soucier du sens péjoratif que lui donnent les colons.", Charles-André Julien, "Colons français et Jeunes Tunisiens", Revue française d'histoire d'outre-mer, 1967, vol. 54, n° 194, p. 84.


30. "Les commentaires du journal "Le Temps" (un des principaux quotidiens français de l'époque), au sujet du discours de Béchir Sfar, incitèrent les organisateurs du Congrès des Colonies à inviter Si Mohamed Lasram, directeur de la Ghaba, professeur à la Khaldounia et ami de Abdelaziz Thaalbi, à prendre part aux travaux du Congrès et à y exposer les questions tunisiennes (...) Il présenta au nom des Jeunes Tunisiens, dont il était l'un des membres les plus en vue, quatorze rapports couvrant de nombreux domaines (enseignement, habous, assistance publique, etc...)". Roger Casemajor, L'action nationaliste en Tunisie, Sud Editions, Tunis, 2009, p. 49.


31.  Cf. Noureddine Sraieb, L'idéologie de l'école en Tunisie coloniale (1881-1945), in "Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée", 1993, 68-69, (Le congrès colonial de Paris, 1908) pp. 245-246.


32. Les rapports exposés par Mhamed Lasram, lors du Congrès de Marseille, ont été publiés en brochure et préfacés par René Millet, ancien Résident Général à Tunis, qui à ce propos déclara : "C'est la première fois, je crois, que, dans un document officiel, on admet un Musulman, non seulement à exposer ses idées, mais à critiquer celles des autres. L'usage que M. Lasram a fait de cette liberté est, par lui-même, un éloquent plaidoyer en faveur de sa race et de sa religion. Il est impossible d'apporter plus de mesure, de bon sens et de raison dans l'exposé de griefs plus légitimes. Il semble qu'un voile se déchire pour nous montrer les dessous d'une société dont nous n'apercevions que la surface...". Cf. Questions tunisiennes : Communications présentées au Congrès Colonial de Marseille (5-9 sept. 1906), extrait du compte rendu officiel du Congrès, Ed. Challamel, Paris 1907 ; Chedly Khairallah, "Essai d'histoire et de synthèse des mouvements nationalistes tunisiens, Le Mouvement Jeune Tunisien", établissement Bonici, Tunis, sd, pp. 75-76.

33. Mon père m'avait remis une dizaine de livrets du Salon Tunisien ayant appartenu à M'd Lasram. J'ai pris l'initiative de les confier à la Directrice de la  Bibliothèque Nationale de Tunis, Mme Raja Ben Slama, le 17/01/2019. Il s'agit des numéros relatifs aux années : 1895, 1896, 1897, 1907, 1911, 1892, 1893, 1894, 2021, 2022, Exposition Jossot, 1912, salle D,  


34. Cf. Ahmed Abdessalam, "Sadiki et les Sadikiens", Cérès Productions, Tunis, 1975, pp. 89-97. En raison de sa vocation pro-nationaliste, l'activité  des anciens de Sadiki a été suspendue par le gouvernement du Protectorat (décret du 13 novembre 1911), cf. Mahmoud Chammam, "Les Clubs littéraires en Tunisie", Imprimerie Publici.T, Tunis, sd. p. 32.


35. www.bourguiba.com. Cf. André Pautard, "Bourguiba", éditions Média, Paris, 1977, p. 57: "Mohamed Lasram, qui portait à la belle langue classique cet amour passionné qu'il sut faire partager à ses élèves,...". Cf Ahmed Chabchoub, "Bourguiba et Moi", Al Manhal, 2O14, p. 13: "Il ne manquait pas non plus d'éloge pour ses professeurs tunisiens qui l'ont initié à la littérature arabe, notamment le cheikh Mohamed Lasram..."


36. Sadok Zmerli, "Figures tunisiennes : les successeurs", MTE, 1967, (M'Hamed Lasram, homme de  lettres et érudit), pp. 87-98  (Ce même article est rapporté dans « La Presse de Tunisie », 17 sept. 2001).


37. Cf. Fethi Zghonda, "Chadharât" (Extraits de ce qui a été dit au sujet de la musique (articles rédigés et reproduits par Cheïkh Mohamed Lasram), Maison arabe du livre, 2001.


38. La Maison de la radio tunisienne, fondée en 1938, dispose de milliers de documents sonores et audiovisuels (bandes, microfilms, cassettes, disques électro-phoniques) sur des programmes très variés (causeries, entretiens, reportages, chansons anciennes …). Cependant, d’énormes abus sont constatés dans la gestion de ces documents, surtout au niveau des modalités de leur conservation. Ils se trouvent en effet amassés pêle-mêle, dispersés dans des locaux abandonnés, exposés aux effets néfastes de l’humidité, au risque de leur perte et de leur pillage. Il est aujourd’hui urgent de protéger et de conserver nos archives radiophoniques en les numérisant, en les éditant et en les diffusant, parce qu’ils constituent un riche patrimoine de notre mémoire nationale. / M. Tahar Melligi (auteur du livre "Les immortels de la chanson tunisienne", MediaCom, 2000), m'a confirmé qu'une bonne partie de ces documents s'est depuis longtemps "volatilisée". Il n'a pu d'ailleurs retrouver les boites contenant les enregistrements sur piano du Cheikh Md Lasram qui pourtant étaient régulièrement diffusés par la radio de 1960 jusqu'au milieu des années 70.


39. Tekka : baguette en bois, ivoire, ambre ou argent, qu'utilisaient les femmes, servant à faire glisser le cordon de ceinture dans les passants du pantalon.


40. Fatma Messaoudi a eu pour second époux Slim Dziri (gendre de Ahmed Bey II, ministre plénipotentiaire et général de division). Son troisième mariage, qui n’a duré que quelques mois, fut avec Ahmed Ben Dhiaf, (petit-fils du chroniqueur). Enfin, elle contracta un quatrième mariage avec un certain Khaznadar. Elle est décédée vers1970 à La Marsa où elle résidait).


41. Cf. Mohamed Bouzghiba, "L'Eminent Cheikh Md Aziz Djaït, sa vie ses réformes, son œuvre »,  Mediterranean Publisher, Tunis Beyrouth, 2010, p. 137 (en arabe).  / Quelques informations, concernant le Cheikh Md Lahbib, m'ont été fournies par son fils Si Mustapha Lasram qui prépare un texte biographique sur son père, s'appuyant sur des documents et correspondances dont il dispose.


42.  Cf. Mongi Khaznadar, « El Monsofiat », (recueil de poèmes de Md. Chedli Khaznadar), vol. III, p. 61.


43. kh. Lasram : Cheikh Mohamed Ali Lasram, un esprit averti et illuminé, « La Presse », 16 nov. 2005.  


44. Les élections législatives, organisées le 2 avril 1989, ont été les premières élections plurielles en Tunisie. Cheïkh Mohamed Lakhoua et Cheïkh Md Ali Lasram étaient respectivement en tête de liste des circonscriptions de Tunis I et de Tunis II. Les résultats des scrutins ont été fortement contestés par certains partis de l'opposition. Cf. Entretien avec Ahmed Manaï (auteur du "Supplice Tunisien : le jardin secret du Général Ben Ali", éd. La Découverte, Paris 1995) : "Les élections de 1989 ont été la plus grande tromperie électorale de notre histoire", Interview réalisée par Slim Bagga, L'Audace", Paris, 5 avril 1999.


45. Cf. Haydée Tamzali, « Images retrouvées », (La demande en mariage, Les fiançailles, Un grand mariage en 1927), MTE,1992, pp.61- 81.  


 46. Khélil Chaïbi, « Les Gloires du Club Africain », éditions Khélil Chaïbi, Tunis, 2009, p. 14. CF. « Les présidents du Club Africain », « Dialogue », n°404, 31 mai 1982.


                                   Khaled Lasram (pages entamées en juin 2014, achevées le 16 février 2016)